« Our rural sense of place » Ruralité et stratégies de défense de l’entre-soi dans la péninsule du Cap (Afrique du Sud)

« Our rural sense of place » Rurality and Strategies of Self-Segregation in the Cape Peninsula (South Africa)

Introduction

Introduction

 

 

Cet article s’intéresse aux stratégies locales de recours à la ruralité comme modalité de défense de l’entre-soi, blanc et aisé, dans le territoire périurbain ségrégué, socialement et racialement, de la Péninsule du Cap, aujourd’hui rattaché à la vaste aire métropolitaine éponyme. L’entre-soi désigne des personnes qui choisissent de vivre et de défendre leur espace de vie (sense of place) en évitant les contacts avec ceux qui n'en font pas partie (et cela en fonction de critères sociaux et culturels : voir pour la France : Charmes, 2011 et Pinçon, Pinçon-Charlot, 2003 ; pour l’Amérique : Chevalier, Carballo, 2004 et pour l’Afrique du Sud Pape, 2003). Le contexte sud-africain d’application de cette notion est très spécifique et implique une forme de perpétuation des héritages passés d’unité socio-raciale datant de la période d’apartheid, sans que cette volonté ne soit ni totalement avouée ni entièrement assumée par les habitants concernés. Le droit au village, incarné dans la Péninsule du Cap par la défense d’un cadre de vie ruralisant, sert donc d’instrument principal à la défense de cet entre-soi « historique ».

This article concerns the local use of so-called rurality as political ways of self-segregation in the socially and racially very segmented Cape Peninsula, which is today incorporated into the vast metropolitan Cape Town area. Self-segregation concerns white people who choose to defend their “sense of place” by avoiding contact with those who are not part of it (depending on social and cultural criteria; concerning France, see Charmes, 2011 and Pinçon, Pinçon-Charlot, 2003; for the USA, see Chevalier, Carballo, 2004 and for South Africa see Pape, 2003). The South African context for the application of this notion is very specific, and implies a form of perpetuation of past legacies of socio-racial units dating from the apartheid era, without this being either totally admitted or fully assumed by the residents concerned. As such, the “right to the village”, which is incarnated in the Cape Peninsula by defending a rural living environment, serves as the main instrument in defending this “historical” self-segregation.

La ruralité n’existe pas en soi. C’est une construction réalisée par les acteurs sociaux, qui se révèle être très complexe en Afrique du Sud. En effet, la ruralité sud-africaine est souvent associée à des représentations du rural très différentes en fonction des groupes de populations concernés (Briedenhann, Wickens, 2004) et de leur référence à un passé commun, considéré comme un âge d’or à valeur patrimoniale. Elle recouvre une grande diversité de situations socio-économiques et paysagères et se perçoit différemment en fonction de l’appartenance culturelle. Pour les Blancs, la ruralité africaine (African[1] rurality) est souvent associée péjorativement aux anciens bantoustans qui combinent pauvreté et isolement. Cette perception explique le mépris existant au Cap envers les « Eastern Cape migrants » (Xhosas provenant des anciens bantoustans du Transkei et du Ciskei). En revanche, la « vraie » ruralité, non précédée de l’adjectif « African » mais associée à la notion de campagne (countryside), est connotée très positivement par les Blancs et définit un style de vie privilégié, basé sur les aménités environnementales et paysagères, comme en témoigne l’existence de « country clubs » : [Rurality] has a character quite the opposite of most of our usual lifestyles – unrushed, uncluttered, traditional, unspoilt landscape and usually quiet” (Briedenhann, Wickens, 2004, p.194). Cette ruralité blanche tend de plus en plus à inclure les fermiers Afrikaners, qui pendant longtemps étaient considérés péjorativement par les Anglophones comme des boers (paysans) un peu rustiques cantonnés à la fonction productive agricole de l’espace rural sud-africain.

Rurality does not exist in itself: it is a social construction that, in the South African context, turns out to be very complex. Indeed, South African rurality is often associated with very different representations of rural life depending on the population groups concerned (Briedenhann, Wickens, 2004), and on their reference to a shared past, considered as a patrimonial golden age. It covers a wide diversity of socioeconomic and landscape situations, and is perceived differently depending on cultural membership. For white people, African[1] rurality is often pejoratively associated with the former Bantustans which combine poverty and isolation. This perception explains why they despise “Eastern Cape migrants” (i.e. Xhosas from the former Bantustans of Transkei and Ciskei). On the other hand, “true” rurality, i.e. not “African” but associated with the notion of “countryside”, is connoted positively by white people and defines a privileged lifestyle, based on environmental and landscape amenities, as testified to by the existence of “country clubs”. [Rurality] has a character quite the opposite of most of our usual lifestyles – unrushed, uncluttered, traditional, unspoilt landscape and usually quiet” (Briedenhann, Wickens, 2004, p.194). White rurality increasingly tends to include white Afrikaans-speaking farmers who, for a long time, were pejoratively considered by white English-speaking South Africans as rustic peasants (or boers) confined to agricultural production in the South African rural space.

Ce dualisme racialisé de la ruralité renvoie à l’inégale répartition du foncier agricole au profit des Blancs (Vircoulon, 2003) et à la relégitimation post-apartheid d’un style de vie « campagnard », « villageois » et communautariste à l’extérieur des grandes métropoles. Un certain « droit au village » est alors revendiqué par des sud-africains blancs cherchant à s'extraire de leur condition urbaine minoritaire pour revendiquer de nouvelles formes d'hégémonie sur des espaces existants réinvestis de valeurs« villageoises » et « campagnardes ». Les revendications des associations de résidents, et leurs pratiques, font émerger certains attributs qui « font rural », « font village » au sens propre et au figuré. Quels sont ces attributs, et pourquoi ces associations considèrent-elles que cela fait rural ?

This racialised dualism of rurality refers to the unequal distribution of agricultural lands to the benefit of the Whites under apartheid (Vircoulon, 2003), and to the post-apartheid re-legitimation of a “country”, “village” and “community” lifestyle outside the large metropolises. Some white South Africans seek to get out of their minority urban condition by claiming the “right to the village”, with a view to claiming new forms of hegemony in existing areas reinvested with “village” and “country” values. The claims and practices of residents’ associations bring out attributes offering a “rural” and “village” feel, in both literal and figurative senses. What are these attributes, and why do these associations consider that they have a rural feel?

Ce « droit au village » s'exprime par des projets de vie ségrégatifs face aux groupes de population dominants métropolitains. Il s’illustre de manière pertinente à St Lucia, dans la province du KwaZulu-Natal (Guyot, 2006-a), à Hogsback dans les montagnes du Cap Oriental (Guyot, Amilhat-Szary, 2010), ou cas encore plus extrême de repli ethnique « villageois », à Orania dans le Cap Septentrional (Rogerson, 2006). Si l’exemple de la Péninsule du Cap tend à se rapprocher de ces expériences guidées par la renaissance d’une pseudo authenticité « villageoise », il s’en distingue aussi par le caractère périurbain voire péri-métropolitain des terrains considérés. La situation de la Péninsule du Cap questionne une interprétation paradoxale du « droit au village », éloignée des perspectives émancipatrices présentes dans le droit à la ville de Lefebvre. Ce « droit au village » n’est pas mobilisé au service des classes laborieuses, mais au service des élites ; il n’est pas utilisé pour élargir l’accès à l’espace, mais pour le restreindre ; et il n’est pas un outil de partage des pouvoirs, mais au contraire implique une captation des décisions locales. Dans le contexte du Cap, ruralité et étalement urbain (urban sprawl) induisent un conflit de représentations entre plusieurs formes de mitage péri-urbain, non-blanc et pauvre versus blanc et riche, qui renvoient invariablement aux héritages des politiques urbaines de l’apartheid (Future Cape Town, 2013). Le « droit au village » des uns (les Blancs aisés) s’oppose au « droit à la ville » des autres (Miraftab, 2007 et De Bruijn, 2010.) Si le processus de justice spatiale implique l’acquisition de droits spécifiques (Gervais-Lambony, 2013), il doit alors aussi incorporer une réflexion sur les questions de légitimité et de légalité d’accès à l’espace. Ainsi, la ruralité défendue par une minorité semble aller à l’encontre d’une urbanité encore peu accessible pour une majorité qui vit en ville sans toutefois bénéficier de ses avantages.

The “right to the village” is expressed in a lifestyle which, in the face of the dominant metropolitan population groups, comes up as segregating. An illustration of this is found in St Lucia, in the KwaZulu-Natal Province (Guyot, 2006-a), Hogsback in the mountains of the Eastern Cape Province (Guyot, Amilhat-Szary, 2010) or still, as an even more extreme case of “village” ethnic withdrawal, Orania in the Northern Cape Province (Rogerson, 2006). While the example of the Cape Peninsula is closer to experiences guided by the renewal of pseudo “village” authenticity, it also differs from these through the peri-urban or even peri-metropolitan nature of the areas concerned. The situation in the Cape Peninsula challenges the paradoxical interpretation of the “right to the village”, removed from the emancipating perspectives of Lefebvre’s “right to the city”. The “right to the village” is not being mobilised at the service of the working class, but at the service of elites; it is not used to widen access to space, but to restrict it; and it is not a tool for power sharing but, on the contrary, implies the capture of local decisions. In the context of the Cape Peninsula, rurality and urban sprawl result in a conflict of representations between several forms of intensive house building in the outlying suburbs, for non-white and poor people versus white and well-off people, which invariably refers back to the legacies of apartheid urban policies (Future Cape Town, 2013). The “right to the village” of the ones (i.e. the well-off Whites) is opposed to the “right to the city” of the others (Miraftab, 2007 and de Bruijn, 2010). While the spatial justice process implies the acquisition of specific rights (Gervais-Lambony, 2013), it also needs to include a whole reflection on issues of legitimacy and legality of access to space. As such, the rurality being defended by a minority, seems to go against an “urbanity”which is still little accessible for a majority that lives in town, and that does not benefit from its advantages for all that.

La ruralité est définie par ses promoteurs péninsulaires comme un style de vie spécifique basé sur l’entre-soi (Charmes, 2011 ; Pape, 2003) au sein d’une atmosphère rurale et d’un paysage protégé pouvant faire éventuellement l’objet d’un processus de patrimonialisation (Belaidi, 2011 ; Guyot et al., 2014). Elle implique aussi une identité territoriale forte de l’entre-soi résumée par la plupart des résidents concernés comme ‘our rural sense of place’, traduisible littéralement par « notre identité rurale ».

Rurality is defined by its Cape Peninsula promoters as a specific lifestyle based on self-segregation (Charmes, 2011; Pape, 2003), in a rural atmosphere and a protected landscape that can potentially be the subject of heritagisation (Belaidi, 2011; Guyot et al., 2014). It also entails a strong territorial identity of self-segregation summarised by most of the residents concerned as “our rural sense of place”.

Xu (1995), à la suite de Tuan (1977, 1990), définit le ‘sense of place’ comme le sentiment d’appartenance à un lieu investi par une identité paysagère forte et s’exprimant par une combinaison de critères toponymiques, de récits personnels ou historiques, d’expériences de vie originales voire d’une dimension spirituelle. Dans le contexte de la Péninsule du Cap cette expression indique, en effet, à la fois un sentiment d’appartenance souvent exclusif à un espace anciennement rural, et l’unicité de ce même espace en relation avec des critères paysagers, architecturaux (Manning, 2004) et culturels. Victor et Fryer interrogent ainsi la question de l’architecture post-apartheid en Afrique du Sud et se demandent à la suite de Lipman (1993) quels en sont les fondements identitaires actuels. “‘Whose memories do [our] buildings stir, whose nostalgias do they gratify, whose cultural roots are being acknowledged’? By refusing these questions, we negate the active role required of us in rebuilding our nation. Instead of creating we ‘erase local senses of place’; we remain stuck, fixed in our dislocation to a place that is ‘never at home’, ‘forever elsewhere’” (Victor, Fryer, 2008). La substance du ‘sense of place’ idéalisée par les résidents concernés est donc nettement questionnée dans le contexte d’identités sud-africaines en perpétuelle quête de relégitimation, et pour lesquelles la question de la nostalgie des lieux est capitale (Gervais-Lambony, 2012), face aux supposées volontés politiques nationales d’éradication de l’européanité en Afrique du Sud qui culminèrent dans les années 2000 avec la promotion de la Renaissance Africaine par T. Mbeki, en particulier en matière toponymique (Giraut et al. 2008) . Ballard et Jones (2011, p.132) parlent en particulier de l’importance des références faites à « l’idylle aristocratique rurale de l’Europe préindustrielle ainsi qu’à la Nature » dans les projets de développement des nouveaux ensembles résidentiels fermés dans la région de Durban.

Following Tuan (1977, 1990), Xu (1995) defines the ‘sense of place’ as a sense of belonging to a place invested by a strong landscape identity, expressed by a combination of toponymic criteria, personal or historical accounts, original life experiences or even a spiritual dimension. In the context of the Cape Peninsula, this expression indicates an exclusive sense of belonging to a former rural space, and at the same time the uniqueness of that very space in relation to landscape, architectural (Manning, 2004) and cultural criteria. Victor and Fryer question the issue of post-apartheid architecture in South Africa and, following Lipman (1993), wonder about the current bases for its identity. “‘Whose memories do [our] buildings stir, whose nostalgias do they gratify, whose cultural roots are being acknowledged’? By refusing these questions, we negate the active role required of us in rebuilding our nation. Instead of creating we ‘erase local senses of place’; we remain stuck, fixed in our dislocation to a place that is ‘never at home’, ‘forever elsewhere’” (Victor, Fryer, 2008). As a result, the substance of the ‘sense of place’ idealised by the residents concerned, is clearly being questioned in the context of South African identities permanently in search of re-legitimation, and for which the issue of nostalgia felt for a place is capital (Gervais-Lambony, 2012), especially in the face of the supposed national political will to see Europeanism eliminated in South Africa, as happened in the 2000s with then President Thabo Mbeki’s promotion of African Renaissance, particularly as regards toponymy (Giraut et al. 2008). Ballard and Jones (2011, p.132) in particular speak about the importance of references made to “the rural aristocratic romance of preindustrial Europe, as well as Nature” in the development projects of the new enclosed residential complexes in the Durban area.

‘Our rural sense of place’ sert d’argument à la défense et à la conservation d’un territoire qui semble menacé par une urbanisation indésirable car pauvre et non-blanche, que ce soit à travers l’extension des quartiers préexistants ou au regard des projets de développement de logements bon marchés, et par son intégration, vivement contestée dès 1995, au sein d’un grand ensemble métropolitain (Cameron, 2005). En effet, si l’ensemble de la population du Cap a augmenté entre 1996 et 2011 de 46 %, sur la même période la population africaine a connu un essor presque trois fois supérieur de 124 %[2]. D’un point de vue socio-économique, si 47 % des foyers capetoniens ont, en 2011, des revenus mensuels très modestes, inférieurs à 3200 ZAR (environ 290 € en 2011), c’est le cas pour 69 % des « Africains »[3] (voir carte n°1). C’est dans ce contexte bien particulier que le sentiment d’appartenance rurale péninsulaire est mobilisé.

‘Our rural sense of place’ is used as an argument in defending and conserving a territory that seems threatened by undesirable – i.e. poor and non-white – urbanisation, whether through the development of existing suburbs or low cost housing development projects, and by its integration – highly contested since 1995 – into a large metropolitan area (Cameron, 2005). Indeed, while the entire population of Cape Town increased by 46% between 1996 and 2011, during the same period the African population increased by almost three times more, i.e. 124%[2]. From a socioeconomic point of view, while 47 % of Cape Town’s households, in 2011, earned very modest monthly incomes of less than R3 200 (around €290 in 2011), this was the case for 69 % of “Africans”[3] (see Map n°1).

La méthodologie a consisté en un travail bibliographique, un travail de terrain réalisé en mars 2013 et avril 2014 (Mission UNPEC) sur la Péninsule du Cap. 35 personnes ont été interviewées, puis une enquête systématique par courriel auprès des associations de résidents et la constitution d’une base de données spatialisées a été réalisée. Les entretiens (de terrain et écrits) ont été effectués essentiellement avec des représentants des associations de résidents, avec des élus métropolitains d’arrondissements et des administratifs et avec des représentants du parc national. Les bases de données cartographiques, réalisées à l’échelle cadastrale, reposent notamment sur un travail de photo-interprétation complété par des vérifications réalisées par les auteurs sur le terrain. Les enquêtes se sont focalisées sur les sous-espaces anciennement ruraux de Constantia, Hout Bay, Noordhoek, Kommetjie et Scarborough–Red Hill.

Our methodology consisted of bibliographic work as well as field work carried out in March 2013 and April 2014 for the UNPEC project in the Cape Peninsula. Thirty-five people were interviewed. A systematic electronic survey with residents’ associations was carried out, and a spatial database was built. Field and written interviews were carried out essentially with the representatives of residents’ associations, metropolitan ward councillors, civil servants and National Park representatives. Cartographic databases (on a cadastral scale) relied in particular on the interpretation of photos complemented by verifications carried out on site by the authors. The surveys focused on the formerly rural areas of Constantia, Hout Bay, Noordhoek, Kommetjie and Scarborough–Red Hill.

Les résidents interrogés recouvrent deux catégories d’habitants : les « anciens » et les « nouveaux ». Les « anciens » sont des résidents péninsulaires « historiques », installés depuis la période d’apartheid, voire avant pour les plus vieux. Ils sont retraités ou proches de la retraite pour la plupart, disposent d’un capital social et économique important et regroupent à la fois des adeptes du patrimoine paysager « culturel » (ruralité culturelle à Constantia, Hout Bay) et des défenseurs de la nature (ruralité « naturalisée » à Noordhoek et Scarborough-Red Hill). Les « nouveaux » habitants sont plus diversifiés et intègrent à la fois des « néo » très riches attirés par la sécurité foncière (gated communities paysagées), et des « alternatifs » cherchant à développer – souvent en famille - des projets d’intégration socio-culturelle et environnementale, tout en plaidant pour une défense du sense of place. Les non-retraités travaillent pour la plupart au Cap comme professionals ou à distance comme consultants par télétravail.

Interviewed residents covered two categories: “former” and “new” residents. “Former” or “historical” residents live in the Peninsula since the apartheid era or even before that for older residents. Most are retired or close to retirement and have at their disposal an important social and economic capital; they include followers of the “cultural” landscape heritage (cultural rurality in Constantia and Hout Bay) and conservationists (“naturalised” rurality in Noordhoek and Scarborough-Red Hill). “New” residents are more diversified and include the neo-rich who are attracted by the safety of landscaped gated communities, and “alternative” people who seek to develop – often with the family – socio-cultural and environmental integration projects, while defending the sense of place. Most non-retired residents work in Cape Town as professionals or as consultants by teleworking.

Cet article analyse les différentes stratégies identitaires et territoriales qui permettent à ces résidents de conserver leur exclusivité territoriale, leur cadre de vie, et leur pouvoir d’influence sur les décisions politiques locales. Leur regroupement en diverses associations de résidents depuis le début des années 1990 est manifeste. La patrimonialisation de la ruralité, à travers ses référents toponymiques et architecturaux « villageois », mais aussi sa composante agricole sont alors convoqués par ces associations pour défendre leur droit à une certaine qualité de vie et leurs privilèges fonciers. Quelle est alors la nouvelle géographie rurale de la Péninsule du Cap prônée par ces associations de résidents (les héritages, les formes actuelles et les usages de cette ruralité)? En quoi la ruralité fonctionne-t-elle comme un nouveau marqueur territorial métropolitain ?

This article analyses the different identity and territorial strategies enabling residents to keep their territorial exclusivity, living environment, and their influence on local political decisions. They have come together into various residents’ associations since the beginning of the 1990s. The heritagisation of rurality, through “village” toponymic and architectural referents, but also through the agricultural component, has been invoked by these associations in defending their right to a certain quality of life and land privileges. Therefore what is the new rural geography of the Cape Peninsula advocated by these residents’ associations (legacies, current forms and uses of rurality)? In which way does rurality function as a new metropolitan territorial marker?

 

 

Carte n°1 : Les disparités socio-économiques dans la péninsule du Cap : proportion des foyers disposant des plus faibles revenus et d’un habitat informel

Map n°1: Socioeconomic Disparities in the Cape Peninsula: Percentage of Households with the Lowest Incomes and Informal Housing

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1/ Une nouvelle géographie rurale de la Péninsule du Cap

1/ New Rural Geography of the Cape Peninsula

 

 

En Afrique du Sud, la péninsule du Cap est le premier territoire colonisé par les Blancs au XVIIe siècle. Au nord de la Péninsule s’est développée la ville du Cap, aujourd’hui une des trois grandes métropoles sud-africaines. Le centre et le sud de cette Péninsule échappent encore aujourd’hui strictement au continuum urbain et constituent plutôt un espace péri-métropolitain, d’aspect souvent semi-rural. Ce dernier (carte n°2) est constitué de petits noyaux urbains (Hout Bay, Fish Hoek, Simons Town), d’une zone d’habitat périurbain et semi-rurale très résidentielle (Noordhoek, Scarborough…) – parfois agricole (vignobles de Constantia) -, ponctuée de deux townships coloured (Hangberg et Ocean View) et de plusieurs zones d’habitat africain en partie informel (Imizamo Yethu, Masiphumelele, Red Hill).

In South Africa, the Cape Peninsula was the first territory to be colonised by the Whites in the 17th century. Cape Town, one of today’s three major metropolises in the country, was developed in the North. To date, the centre and south of the Peninsula are still not strictly part of the urban continuum and, rather, constitute a peri-metropolitan area, often taking on a semi-rural aspect. This area (Map n°2) is made up of small urban nodes (Hout Bay, Fish Hoek, Simons Town), a periurban and semi-rural residential area (Noordhoek and Scarborough) which is sometimes agricultural (the vineyards of Constantia), punctuated by two Coloured townships (Hangberg and Ocean View) and several partly informal African settlements (Imizamo Yethu, Masiphumelele and Red Hill).

 

 

Carte n°2 : Typologie des espaces résidentiels dans la péninsule du Cap

Map n°2: Typology of Residential Spaces in the Cape Peninsula

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1.1. Héritages péninsulaires : étalement urbain et ruralité en débat

1.1. Legacies of the Peninsula: The Urban Sprawl-Rurality Debate

 

 

La protection de la nature sur la Péninsule du Cap, et sa proximité avec une métropole multimillionnaire expliquent en partie la tension actuelle existant entre une volonté de limiter certaines formes d'urbanisation, et un processus d'installation de populations de couleurs défavorisées. L'attractivité de la Péninsule rend l'urbanisation "par le haut" inéluctable. Cependant, bien que les prix du foncier rendent plus compliqués de nouvelles arrivées de populations défavorisées, il persiste un risque réel d'invasions foncières illustré par Imizamo Yethu (Hout Bay) ou Masiphumelele (Kommetjie). Se pose ainsi la question de l'urban sprawl (étalement urbain), pendant ou repoussoir de la ruralité, en fonction de la représentation que les populations peuvent s’en faire. Alors qu’elle est un aspect critiqué du développement de la ville d’apartheid, la notion d'urban sprawl est aujourd'hui employée par l’ensemble des représentants d’associations de résidents interviewés pour désigner le péril représenté par l'arrivée de populations africaines du Cap Oriental sur la Péninsule. Le même dédoublement de sens s'opère pour la notion de ruralité qui passe d'une signification péjorative désignant le style de vie africain dans les Bantoustans à un nouvel idéal pseudo-« campagnard » métropolitain teinté d'européanité. Le statut de territoire d’administration rurale de la Péninsule pendant l'apartheid (DIVCO, voir plus loin) et l'interdiction de résidence des populations africaines expliquent en partie ce glissement de perspectives.

Conservation in the Cape Peninsula and the nearby existence of a multimillionaire metropolis, partly explain the current tension found between the desire to limit certain forms of urbanisation, and the desire to ensure the settlement of disadvantaged non-white populations. The attractiveness of the Peninsula makes urbanisation “from the top” inescapable. However, although real estate prices make the arrival of disadvantaged populations more complicated, land invasion as seen in Imizamo Yethu (Hout Bay) or Masiphumelele (Kommetjie), are still a risk. The issue of urban sprawl then comes to mind, whether as a promoting or repellent factor of rurality, depending on how populations perceive it. Whereas the notion of urban sprawl was a criticised aspect of the white suburban development of the apartheid city, it was used by all interviewed representatives of residents’ associations, to designate the danger which the arrival of Eastern Cape African populations represents for the Peninsula. The same dual meaning also applies to the notion of rurality that goes from a pejorative meaning, designating the African lifestyle in the Bantustans, to a new metropolitan pseudo-country ideal with a tinge of Europeanness. The status of rural administration territory of the Peninsula during apartheid (see DIVCO further on) and the fact that African populations were forbidden to reside there, partly explain this shift in perspective.

En effet, la Péninsule du Cap est un archétype des politiques de division raciale du régime d’apartheid. Ce territoire était sous l’apartheid presque exclusivement réservé aux populations blanches, au titre du Group Areas Act (1950). Ainsi, les Africains sont interdits de résidence sur la péninsule, en particulier ceux de Luyolo (à proximité de Simons Town) expulsés en 1965 (Guyot et al., 2014). Quant aux Coloureds, ils vont être regroupés dans deux townships  d’Hangberg et d’Ocean View construits en 1968. Ces déplacements des populations coloured vont déposséder des dizaines de familles de leur style de vie « campagnard » dans des exploitations agricoles localisées dans les campagnes péninsulaires (Haysom, 2007 ; Trotter, 2002 ; Heiss, 2001). Ce déni de ruralité coloured  permet ainsi aux Blancs de contrôler totalement les espaces ruraux péninsulaires dans les années 1970. Les chaînes montagneuses de la Table et de la Péninsule et les littoraux découpés servent de décor à une mosaïque d’espaces ruraux viticoles, pastoraux et résidentiels possédés par de riches propriétaires blancs.

Indeed, under apartheid, the Cape Peninsula, which was an archetype of racial division policies, was almost exclusively reserved for white populations under the Group Areas Act (1950). As such, Africans were forbidden to reside on the Peninsula, particularly those from Luyolo (near Simons Town) who had been evicted in 1965 (Guyot et al., 2014). As to the Coloured, they were moved to the two townships of Hangberg and Ocean View which were built in 1968, thereby dispossessing dozens of families from their “country” lifestyle in farms located in the Peninsula’s countryside (Haysom, 2007; Trotter, 2002; Heiss, 2001). This denial of Colouredrurality led the Whites to control all the rural areas on the Peninsula during the 1970s. The ranges of Table Mountain and the Peninsula, and the jagged coastline serve as decor to a mosaic of wine-growing, pastoral and residential rural areas owned by wealthy white owners.

La majorité du territoire de la Péninsule est alors administrée par le Divisional Council (DIVCO, créé en 1855) puis par les Regional Service Council (RSC) de 1985 à 1995, qui sont des autorités d’administration rurale durant la période d’apartheid. Au sein du territoire péninsulaire du DIVCO, plusieurs localités rurales, sortes de villages d’habitat dispersé, possèdent aussi leurs propres conseils locaux : Llandudno, Hout Bay, Constantia, Noordhoek, Kommetjie et Scarborough. Ceci implique un très fort attachement de ces habitants à leur structure locale. Dès la fin de l'apartheid, la Péninsule est progressivement intégrée au sein de l'autorité métropolitaine du Cap, au corps défendant des résidents qui créent en réaction plusieurs associations de contribuables (voir tableau n°1).

Most of the Peninsula’s territory was administered by the Divisional Council (DIVCO) created in 1855, and by the Regional Service Council (RSC) from 1985 to 1995, both being rural administrative authorities under apartheid. Within the Peninsula territory of the DIVCO, several rural localities, similar to villages made up of scattered houses, also have their own local councils: Llandudno, Hout Bay, Constantia, Noordhoek, Kommetjie and Scarborough. This implies that residents are strongly linked to their local organisation. As early as the end of apartheid, the Peninsula was progressively integrated into the Cape Town metropolitan authority. In reaction, residents created several tax payers’ associations (see Table n°1).

Un nouveau front d’urbanisation postapartheid voit alors l’arrivée de populations essentiellement africaines (Xhosas et étrangères) sur la Péninsule. L’installation résidentielle des employés de maison, issus des populations africaines, devient une nécessité, compte tenu des difficultés de liaison entre la ville du Cap, les Cape Flats[4] et la péninsule. Cette nouvelle urbanisation prend à revers les inégalités spatiales passées, mais les conditions de son développement entre informalité, précarité sanitaire et perpétuation d’un travail sous-payé, en font plutôt un pis-aller.

A new post-apartheid urbanisation front then saw the arrival of mainly African populations (Xhosas and foreigners) on the Peninsula. The fact that African domestic workers had to reside on site due to difficulties encountered when travelling between Cape Town, the Cape Flats[4] and the rest of the Peninsula, became a necessity. While this new form of urbanisation caught up with former spatial inequalities, the conditions of its development between informality, sanitary challenges and the perpetuation of underpaid labour turned it into a stopgap instead.

Les premières arrivées sur le site de Masiphumelele (carte n°3), débutent dans les années 1980. "In the early 1980s a group of 400-500 people started the informal settlement in the area where the Longbeach Mall is located, close to where Masiphumelele is today. They came from Khayalitsha, Nyanga and Langa townships, more than 30 kms away. At first there were no facilities – no streets, water or toilets[5].”Une partie de cet habitat va être formalisé au début des années 1990 grâce à l’action d’ONG caritatives. Le même processus va avoir lieu dans le même temps à Imizamo Yethu sur les pentes d’Hout Bay.

The first arrivals on the Masiphumelele site (Map n°3) began in the 1980s. « In the early 1980s a group of 400-500 people started the informal settlement in the area where the Longbeach Mall is located, close to where Masiphumelele is today. They came from Khayalitsha, Nyanga and Langa townships, more than 30 km away. At first there were no facilities – no streets, water or toilets[5].” Part of this housing became formalised in the early 1990s, thanks to the action of charity organisations. The same process was to take place at the same time in Imizamo Yethu on the slopes of Hout Bay.

La croissance d’Imizamo Yethu et de Masiphumelele a bouleversé les équilibres démographiques entre Blancs, Coloureds et Africains sur la Péninsule. Ainsi, lors du recensement de 1996 on comptait seulement 14 000 Noirs, alors qu’ils sont près de 50 000 au recensement de 2011 (carte n°3). Nombre d’anciens résidents blancs s’inquiètent de cette nouvelle promiscuité urbaine et se saisissent d'un renouveau de « leur » ruralité héritée comme d’un possible rempart.

The way Imizamo Yethu and Masiphumelele grew over the years drastically changed the demographic balance between Whites, Coloured and Africans on the Peninsula. While the 1996 census accounted for 14 000 Blacks, that of 2011 accounted for 50 000 (see Map n°3). Many former white residents are concerned by this new urban crowding, and are using a renewal of “their” inherited rurality as a possible shield.

 

 

Carte n°3 : carte en anamorphose de la population de la péninsule du Cap par suburb en 2011.

Map n°3: Anamorphic Map of the Cape Peninsula Population by Suburb in 2011.

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1.2. Dynamiques spatio-temporelles de la nouvelle ruralité péninsulaire

1.2. Spatio-Temporal Dynamics of the New Peninsula Rurality

 

 

La carte n°4 localise de manière diachronique l’ensemble des toponymes à consonance rurale utilisés actuellement sur ce terrain. Villages, exploitations agricoles (farms), domaines (estates) et vallées (valleys) sont les principaux termes « ruralophones » employés. Ces toponymes relèvent de la géographie rurale sud-africaine blanche et se retrouvent au cœur des régions agricoles de production fruitière ou viticole des montagnes de la Province du Cap de l’Ouest (Franshoek, Paarl, Ceres, Montagu). Ils font référence à l’histoire, au bâti, au paysage et à la nature. L’espace péninsulaire est caractérisé par plus d’une cinquantaine de ces toponymes, ce qui révèle une volonté importante d’identification à la ruralité de la part d’acteurs variés : résidents, entrepreneurs, exploitants, élus, etc. Un tiers de ces dénominations ont été données pendant la période coloniale ou d’apartheid, et les deux tiers ensuite (recensement des auteurs, cf carte n°4). Il s’agit donc bien d’un espace où la ruralité s’impose comme une construction surtout contemporaine, en utilisant les nombreux héritages historiques comme facteurs de légitimation.

Map n°4 shows the diachronic location of all rural-sounding toponyms currently used in the Peninsula. Villages, farms, estates and valleys are the main terms used in this case. These toponyms relate to white rural South African geography, and can be found in the heart of agricultural regions producing fruit or wine in the mountain areas of the Western Cape Province (Franshoek, Paarl, Ceres and Montagu). They refer to history, buildings, landscapes and nature. The Peninsula area being characterised by more than fifty of these toponyms, shows that those concerned feel strongly about identifying with rurality, such actors being residents, contractors, farmers, elected representatives, etc. One third of these denominations were given during the colonial or apartheid era, and the rest thereafter (authors’ survey, see Map n°4). As such, the Peninsula represents an area where rurality comes up as a contemporary construction, by using many historical legacies as legitimization factors.

 

 

Carte n°4 : l’utilisation de toponymes ruraux dans la Péninsule du Cap

Map n°4: The Use of Rural Toponyms in the Cape Peninsula

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Le terme « estate » est celui qui revient le plus dans les dénominations, pour désigner des domaines viticoles, avant l’apartheid, et des « gated communities », après l’apartheid. Ces dernières s’organisent à la manière de domaines résidentiels renvoyant au patrimoine rural ou naturel de la péninsule par le recours à l’esthétique architecturale Cape Dutch ou à des essences floristiques indigènes pour la mise en valeur des extérieurs (Kenrock Country Estate à Hout Bay). Suit le terme de « farm », qui opère un glissement de la fonction agricole (Ishta Farm) à la fonction commerciale (Imhoff Farm, voir photo n°1), et sert de vecteur au marketing touristique péninsulaire (Cape Farmhouse). Le terme de « village » n’est utilisé qu’une dizaine de fois, mais désigne des opérations résidentielles parfois importantes (Silvermine Village à Noordhoek). Il désigne tantôt un centre commercial, structurant d’un point de vue territorial (Constantia et Noordhoek), tantôt des villages stricto sensu (Misty Cliffs et Scarborough). Les autres termes recouvrent une plus grande diversité de situations : valleys, stables, etc.

Before apartheid, “estate” was the most used term in denominations to designate wine estates. After apartheid, the most used term was “gated community” which is organised in much the same way as residential estates, by referring to the rural or natural heritage of the Peninsula, based on Cape Dutch architecture or indigenous flora (e.g. Kenrock Country Estate in Hout Bay). Then comes the term “farm” which suggests a shift from the agricultural function (e.g. Ishta Farm) to the commercial function (e.g. Imhoff Farm, see photo n°1), and serves as a vector of tourist marketing on the Peninsula (Cape Farmhouse). Although the term “village” is only used a dozen times, it can designate potentially significant residential operations (e.g. Silvermine Village in Noordhoek). Sometimes it designates shopping centre (e.g. Constantia and Noordhoek) and sometimes actual villages (e.g. Misty Cliffs and Scarborough). The other terms cover a greater diversity of situations: valleys, stables, etc.

 

 

Photo n°1 : Imhoff Farm, la fonction productive comme alibi d’un développement commercial tous azimuts : restaurant, artisanat, promenades à dos de chameaux, parcs à thèmes (clichés des auteurs, 2013)

Photo n°1: Imhoff Farm, using productive function as alibi for an all-out commercial development: restaurant, craft, camel rides and theme parks. (Photos by the authors, 2013)

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Constantia apparaît comme le cœur historique de cette ruralité. C’est au sein de cet espace que l’on trouve le plus de toponymes datant de la période coloniale pré-apartheid, avec une domination du terme « estate » qui caractérise essentiellement les vieux domaines viticoles. Les habitants de Constantia vont donc jouer sur cette supposée authenticité de leur ruralité. Noordhoek, en revanche, est l’archétype même du processus de résurgence rurale. C’est ici que l’on trouve le plus de dénominations « ruralophones » post-apartheid recouvrant tout le spectre typologique étudié (villages, estates, farms) et bien représenté par Noordhoek Farm Village. Ce dernier s’impose aujourd’hui comme le cœur commercial et touristique de cet espace. Il est d’ailleurs bien décrit par le guide touristique Lonely Planet comme un « faux-village » (sic)[6]. De fait, le Noordhoek Farm Village, dont la construction remonte à 1995, emprunte tous les codes de l’architecture Cape Dutch (fronton proéminent décoratifs, murs blanchis à la chaux) tout en les travestissant (toits de tôle en lieu et place de toits de chaume, pelouses artificielles) (photo n°2). Ainsi, à Noordhoek, la mobilisation d’une certaine idée de la ruralité sert d’argument pour préserver les niveaux élevés du foncier, liés à une qualité de vie sans équivalent sur la péninsule du fait des aménités naturelles offertes. Hout Bay comprend aussi une grande majorité de dénominations « ruralophones » post-apartheid, nettement spécialisées dans la fonction résidentielle, avec l’utilisation dominante du terme « estate » pour nommer des « gated communities », qui empruntent parfois d’autres mots évocateurs du paysage environnant (Ryuterplaats Private Mountain Estate). Kommetjie et surtout le sud de la péninsule recouvrent une plus grande diversité de situations chronologiques, toponymiques et fonctionnelles, à l’image d’un espace toujours le moins urbanisé de la péninsule. Au-delà de la terminologie toponymique, cette quête de ruralité, entre pseudo authenticité et artificialité, revêt des formes complémentaires, allant des représentations paysagères aux archétypes architecturaux.

Constantia appears as the historical heart of this rurality. Most toponyms dating from the colonial period are found in that area, with the term “estate” dominating and characterising mainly old wine farms. The residents of Constantia play on the so-called authenticity of their rurality. Noordhoek, on the other hand, is the very archetype of the rural resurgence process. This is where we find the most post-apartheid rural denominations covering the entire typological range under study (villages, estates, farms). This is well represented by the Noordhoek Farm Village which comes up as the commercial and tourist centre of the area. Interestingly, the Lonely Planet guide described it as a “false village” (sic)[6]. Noordhoek Farm Village, which was built in 1995, borrows many of the codes of Cape Dutch architecture (ornately rounded gables, whitewashed walls) while adapting others (corrugated iron instead of thatched roofs and artificial lawns) (Photo n°2). In Noordhoek, rurality is used as an argument to maintain property prices high, linked to an unequalled quality of life in the Peninsula, thanks to existing natural amenities. Hout Bay also includes many post-apartheid rural denominations which are definitely specialised in the residential function, with the use of the term “estate” dominating to designate “gated communities”, and which sometimes borrow other words evoking the surrounding landscape (Ryuterplaats Private Mountain Estate). Kommetjie and the southern section of the Peninsula in particular, cover a greater diversity of chronological, toponymic and functional situations. Beyond toponymic terminology, the quest for rurality, between pseudo authenticity and artificiality, takes on additional forms going from landscape representations to architectural archetypes.

 

 

Photo n°2 : Architecture d’inspiration Cape Dutch et pelouses artificielles : l’esthétique du « village » jusqu’à la caricature (Noordhoek Farm Village, clichés des auteurs, 2013)

Photo n°2: Cape Dutch-inspired architecture and artificial lawns in Noordhoek Farm Village. (Photos by the authors, 2013)

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1.3. La construction d’une néo-ruralité

1.3. Building Neo-Rurality

 

 

L’identité rurale de la Péninsule du Cap s’appuie sur la persistance d’espaces agricoles productifs (Caillot, 2013), bien que les pratiques et les productions aient connu de profondes mutations depuis la fin de l’apartheid. Hormis les domaines viticoles de Constantia, qui peuvent se prévaloir d’une réputation historique, la majorité des autres domaines sont apparus après 1995. Pour le reste, les exploitations consacrées à l’élevage ont pour certaines disparu, remplacées par des développements résidentiels ou des productions de niche (maraîchage biologique, élevage d’autruches…)  : Cape Point Vineyards créé en 1996, Avalon Village en 2007 ou encore Living Art Farm en 2012 (carte n°4). Ou bien elles se sont adaptées en diversifiant de manière conséquente leur activité à l’image de l’Imhoff Farm (voir photo n°1). Ces mutations, outre le fait d’assurer un renouveau des activités et des paysages agricoles sur la Péninsule, contribuent à assoir l’image d’une ruralité construite autour d’une certaine idée de la qualité de vie (productions locales de qualité : vins, légumes biologiques).

The rural identity of the Cape Peninsula relies on the persistence of productive agricultural spaces (Caillot, 2013), although practices and productions have experienced deep changes since the end of apartheid. Except for the wine estates of Constantia, which take advantage of their historical reputation, the majority of the other estates appeared after 1995. As for the rest, certain cattle breeding farms have disappeared and been replaced with residential developments or niche productions (organic market gardening, ostrich farms etc.): Cape Point Vineyards created in 1996, Avalon Village in 2007 or, still, Living Art Farm in 2012 (Map n°4). Or they adapted by significantly diversifying their activity in the image of Imhoff Farm (see Photo n°1). These changes, in addition to ensuring a renewal of activities and agricultural landscapes on the Peninsula, contribute to the image of rurality as quality of life (local productions of quality: wine and organic vegetables).

Parallèlement, le développement de zones résidentielles, notamment des « gated communities » depuis la fin de l’apartheid, d’hébergements touristiques et de diverses activités de loisirs (golf, équitation) répond, dans l’ensemble, à un archétype architectural et paysager commun. Les emprunts généralisés à l’architecture Cape Dutch[7], jusque dans les portes d’entrés des « gated communities » et le recours revendiqué à des plantes endémiques participent en effet à véhiculer une esthétique rattachée aux grands domaines coloniaux, ainsi qu’un sentiment d’unicité et d’authenticité du paysage (Manning, 2004 ; Victor, Fryer, 2008 ; Ballard, Jones, 2011). Ainsi, la « gated community » de Ruyteplaats Estate, sur les hauteurs de Hout Bay, dispose de sa propre pépinière de plantes indigènes et propose à ses résidents une immersion dans un véritable jardin botanique, laissant toutefois une place à quelques espèces exotiques telles que les pins, pourvoyeuses d’aménités paysagères méditerranéennes (photo n°3). Cette « néo-ruralité », utilisée jusqu’à la caricature dans le cas de Noordhoek Farm Village et ses pelouses artificielles (photo n°2), est ici mobilisée au service d’une identité « villageoise » construite en opposition apparente avec la métropole.

In parallel and on the whole, the development of residential areas, “gated communities” in particular since the end of apartheid, tourist accommodations and various leisure activities (golf and horse riding), exemplifies a shared architectural and landscape archetype. Borrowing from Cape Dutch architecture[7] and resorting to endemic plants contribute to conveying aesthetics associated with large colonial estates, as well as a sentiment of landscape uniqueness and authenticity (Manning, 2004; Victor, Fryer, 2008; Ballard, Jones, 2011). In this regard, the “gated community” of Ruyteplaats Estate, in upper Hout Bay, benefits from its own nursery of indigenous plants, and offers residents complete immersion in a real botanical garden, keeping however a few exotic species such as pine trees, for that Mediterranean feel (photo n°3). “Neo-rurality”, which is caricatured in the case of Noordhoek Farm Village, with its artificial lawns (photo n°2), is used to create a “village” identity directly in contrast with the metropolis.

 

 

Photo n°3 : Allées du Ruyteplaats Estate sur les hauteurs d’Hout Bay, entre résidentiel haut de gamme et jardin botanique (clichés des auteurs, 2013)

Photo n°3: Alleys in Ruyteplaats Estate in upper Hout Bay, between upmarket residential area and botanical garden. (Photos by the authors, 2013)

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Cependant, sur le plan paysager, les derniers développements résidentiels ou touristiques prennent place en périphérie des localités, où ils investissent des sites en position dominante dotés de panoramas de qualité. C’est le cas de Monkey Valley Resort, à l’aplomb de la plage de Noordhoek, où des toits de chaume dominent le tissu résidentiel peu dense de l’ouest de la localité (photo n°4). Paradoxalement, à force de chercher à se singulariser, notamment par la conquête des sites offrant les panoramas les plus attractifs, plutôt qu’à se fondre dans ce cadre paysager, ces nouveaux développements tendent à compromettre l’authenticité recherchée.

Concerning landscapes, the latest residential or tourist developments took place outside these villages, on sites with quality panoramas. This is the case of the Monkey Valley Resort which is overlooking Noordhoek beach, where thatch roofs dominate the residential fabric in the west (photo n°4). Paradoxically, by keeping on trying to become different, particularly by looking for sites with the most attractive panoramas rather than to blend in, these new developments tend to jeopardise the authenticity sought after initially.

 

 

Photo n°4 : vues depuis la Chapman’s Peak Road : le tissu résidentiel lâche de Noordhoek (photo de gauche) et le Monkey Valley Resort devant la plage de Noordhoek (photo de droite) (clichés des auteurs, 2013)

Photo n°4: Views from Chapman’s Peak Road: the loose residential fabric of Noordhoek (left) and the Monkey Valley Resort in front of Noordhoek beach (right). (Photos by the authors, 2013)

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D’autres représentations, mêlant ruralité et contexte péninsulaire, sont également convoquées par les habitants. Il s’agit en l’espèce de développer l’image de bout du monde, favorisée par la localisation géographique et renforcée par le relatif isolement offert par les reliefs de la Péninsule. Cette valorisation des confins présentés comme préservés, sauvages, légitime une volonté de ségrégation organisée par les résidents afin d’éviter toute forme d’urbanisation. La revendication du statut, non officiel, de Conservation Village par Scarborough et Misty Cliffs, illustre cette affirmation d’une spécificité géographique et d’une richesse écologique (photo n°5).

Other representations, mixing rurality and the context of the Peninsula, are also called upon by residents. In the case in point, an “end of the earth” image has been developed, favoured by geographic location and reinforced by the relative isolation offered by the reliefs of the Peninsula. Presenting a confined area as being wild and protected, legitimates segregation as organised by residents in order to avoid any form of urbanisation. The fact that Scarborough and Misty Cliffs claim the – non-official – status of Conservation Village, illustrates this (photo n°5).

 

 

Photo n°5 : Misty Cliffs, village du bout du monde ou lieu de villégiature chic pour riches Capetoniens ? (clichés des auteurs, 2013)

Photo n°5: Misty Cliffs, village at the end of the earth or holiday resort for rich Capetonians? (Photos by the authors, 2013)

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2/ La ruralité, un nouveau marqueur territorial métropolitain ?

2/ Rurality: New Metropolitan Territorial Marker?

 

 

Dans la Péninsule du Cap, chaque localité dispose d’une ou plusieurs associations de résidents ayant pour vocation de s’inviter dans la gouvernance participative locale en tant que groupe de pression, que ce soit à l’occasion des consultations publiques organisées lors de la constitution des documents d’aménagement (City of Cape Town (a), 2011) ou dans le cadre de revendications plus spécifiques et localisées, voire nimbystes. Les minutes des consultations publiques relatives au Southern District Plan de 2011 (City of Cape Town (b), 2011) sont ainsi riches d’enseignements. Les associations de résidents sont en effet très représentées dans le volume dévolu aux commentaires. Elles développent un important argumentaire, tant sur le plan des impacts environnementaux de l’urbanisation, que sur l’encadrement de futurs projets d'urbanisation. Plus précisément, ces associations entendent démontrer l’existence d’une identité péninsulaire, distincte de celle de la ville du Cap stricto sensu, qu’il conviendrait de défendre face au processus de métropolisation en cours. Certains éléments sont ainsi communément mobilisés tels que la cohérence architecturale autour du modèle Cape Dutch, la faible densité d’urbanisation, la présence d’espaces agricoles productifs et un lifestyle perçu comme « villageois » et de qualité du fait des nombreuses aménités naturelles offertes par cet espace.

In the Cape Peninsula, each locality has one or several residents’ associations taking part as pressure groups in local participative governance, whether during public consultations organised during the constitution of planning documents (City of Cape Town (a), 2011), or within the framework of more specific and localised – or even NIMBYst – claims. The minutes of public consultations concerning the Southern District Plan of 2011 (City of Cape Town (b), 2011), are very instructive in this regard. Residents’ associations are indeed very much represented in the volume allotted to comments. They elaborate an important argument at the level of the environmental impacts of urbanisation, as well as about the supervision of future urbanisation projects. More specifically, these associations intend to show the existence of a Peninsula-specific identity distinct from that of Cape Town, which should be defended in the face of ongoing metropolisation. Some elements are thus commonly mobilised such as architectural coherence around the Cape Dutch model, low urbanisation density, the presence of productive agricultural areas and a lifestyle perceived as being a village-like and quality lifestyle due to the many natural amenities.

A cet égard, l’intégration de la Péninsule dans l’organisation métropolitaine est considérée comme un danger potentiel par les résidents. Le caractère récent de ces associations, toutes nouvellement créées à l’exception de celle de Kommetjie, est d’ailleurs révélateur de cette mobilisation face à la restructuration post-apartheid des découpages administratifs de la Péninsule (tableau n°1). Le refus d’une mainmise territoriale par des acteurs extérieurs à la Péninsule ne vise pas seulement le pouvoir métropolitain. Cette même défiance est exprimée envers SANParks (l’autorité de gestion du parc national de la Montagne de la Table) par un certain nombre d’associations qui s’intéressent à la protection du patrimoine naturel et en particulier à la gestion des plantes invasives.

Residents view the Peninsula’s integration into the metropolitan organisation as a potential risk. The fact that all these associations, except for that of Kommetjie, have been created recently says a lot in this regard, and vis-à-vis the post-apartheid restructuring of the Peninsula’s administrative divisions (Table n°1). The refusal of residents to see their territory taken over by actors outside of the Peninsula is not directed at the metropolitan authorities in particular; some residents’ associations are also refusing to accept the fact that SANParks is showing an interest in protecting the natural heritage and in managing invasive plants.

Sur le plan de l’urbanisme, ces associations partagent une même vision alarmiste quant à l'urbanisation rampante de la Péninsule. La consommation rapide du foncier et la transformation progressive des localités de la Péninsule en banlieues résidentielles du Cap, essentiellement dues à l’installation de populations aisées, sont combattues par ces associations : les interventions des associations de résidents relevées lors des échanges sur le Southern District Plan (City of Cape Town (b), 2011) montrent que cette opposition relève de deux logiques de défense  distinctes  incarnés par les exemples de Constantia et de Noordhoek.

At the town-planning level, these associations share the same alarmist vision concerning the Peninsula’s rampant urbanisation. Rapid land consumption and the progressive transformation of the Peninsula’s towns into Cape Town suburbs, mainly due to the settlement of well-off populations, are fought against by these associations: the interventions of residents’ associations recorded during the meetings on the Southern District Plan (City of Cape Town (b), 2011), show that this opposition concerns two distinct logics of defence, as illustrated by the examples of Constantia and Noordhoek.

 

 

Tableau n°1 : défense de la ruralité péninsulaire par les associations de résidents (source : enquête associations locales)

Table n°1: Defence of rurality in the Peninsula by residents’ associations (source: local association survey)

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2.1. Constantia, la défense de l’entre-soi par la patrimonialisation

2.1. Constantia, Defending Self-Segregation through Heritagisation

 

 

La première logique, plutôt présente au nord de la Péninsule (Constantia, Hout Bay & Llandudno), dans des quartiers inscrits dans la continuité du tissu urbain métropolitain, cherche essentiellement à freiner l’installation de foyers à faibles revenus. Ceux-ci sont, aux yeux des associations de résidents, responsables d’une dénaturation du cadre de vie du fait de leur plus grande densité et d’une architecture plus hétéroclite. La notion de village et le recours au patrimoine culturel se trouvent ici utilisés pour justifier l’opposition au développement d’habitats bon marché et, par ricochet, à l’installation de nouvelles familles noires et pauvres dans ces quartiers à dominante blanche et aisée (Pape, 2003). Si cet objectif est atteint pour Constantia, ce n’est pas le cas pour Hout Bay où la coexistence entre les habitants d'Imizamo Yethu (habitat informel africain) et ceux des quartiers riches s'avère conflictuelle (Monaco, 2008; Swanepoel, 2013).

The first principle, which is found more in the north of the Peninsula in suburbs that contribute to the continuity of the metropolitan urban fabric (Constantia, Hout Bay & Llandudno), seeks mainly to put a break on the establishment of low income households. In the eyes of residents’ associations, these households are responsible for the denaturation of the living environment, due to their greater density and a more heterogeneous architecture. The notion of village and resorting to cultural heritage are used here to justify residents’ opposition to the development of low cost housing and, as an indirect result, to the settlement of new black and poor families in these mainly white and well-off areas (Pape, 2003). While this objective is reached for Constantia, it is not the case for Hout Bay where coexistence between the residents of Imizamo Yethu (informal housing) and those of rich suburbs prove to be contentious (Monaco, 2008; Swanepoel, 2013).

Constantia est un quartier situé sur le versant oriental de la Montagne de la Table. Sa population est majoritairement blanche (75 % des résidents) et très aisée. Ainsi, 37 % des foyers disposent d’un revenu mensuel supérieur à 52 201 ZAR (5 000€) contre seulement 5 % à l’échelle de l’aire métropolitaine du Cap. Cette particularité s’explique à la fois par l’histoire du quartier, marqué par la présence des domaines viticoles éponymes qui ont participé à forger l’identité de ce quartier résidentiel de la bourgeoisie capetonienne, mais aussi par l’exclusion progressive des populations ouvrières non blanches, ici essentiellement coloured. La politique de ségrégation raciale durant l’apartheid puis des logiques individuelles de relégation vers les périphéries plus lointaines des ouvriers agricoles coloured[8] ont ainsi contribué à façonner une recomposition sociale en faveur des plus riches.

The suburb of Constantia is situated on the eastern slope of Table Mountain. Its population is predominantly white (75 %) and very well-off. As such, 37 % of households earn more than   ZAR 52 201 (5 000 €) per month, against only 5 % on the entire Cape Town metropolitan scale. This can be explained historically, where the presence of wine estates helped to forge the identity of this upper middle-class Capetonian suburb. It can also be explained through the progressive exclusion of the non-white working-class populations, mainly Coloured in this case. Racial segregation policies under apartheid and, later, the relegation of Coloured[8] farm workers towards the outskirts, helped to change the social fabric in favour of the rich.

Les efforts politiques déployés par des associations de résidents (dont la Constantia Properties Owner’s Association, CPOA), afin de faire reconnaître la valeur patrimoniale d’un quartier adossé aux domaines fondateurs du vignoble sud-africain (Rouvellac et al., 2012), s’inscrivent pleinement dans cette logique de défense d’un entre-soi réservé aux plus riches. Le discours développé, notamment lors des négociations autour du Southern District Plan, pointe dans un premier temps la dégradation continue du caractère rural de Constantia par des développements récents qui ne respectent pas l’unité architecturale du lieu (Manning, 2004). Ce faisant, la CPOA cherche à faire entériner un certain nombre de contraintes, et notamment le respect de normes architecturales haut de gamme pour tout nouveau projet de constructions. Parallèlement, la CPOA lutte contre la possibilité de subdivision des parcelles existantes en plusieurs lots constructibles. En effet, au-delà de la présence de nombreux espaces verts, Constantia, avec une superficie moyenne de 2 000 m² par parcelle, a la plus faible densité des quartiers de la métropole - à l’exception des localités du sud de la Péninsule. Ce cadre paysager, dont les codes puisent pour l’essentiel dans la période coloniale, est également défendu à travers l’opposition de la CPOA au programme de coupes des plantations « exotiques » de pins, chênes et eucalyptus dans le cadre d’un programme de restauration du fynbos[9] conduit par SanParks. Enfin, la CPOA a activement soutenu la candidature du domaine viticole historique de Groot Constantia[10] auprès de l’UNESCO en 2005 au titre du patrimoine culturel dans l’espoir de voir ainsi légitimer son action en faveur d’une "mise sous cloche" de Constantia.

The political efforts deployed by residents’ associations, including Constantia Properties Owner’s Association (CPOA), with a view to ensuring that the asset value of a suburb located right up against a South African wine estate is recognised (Rouvellac et al., 2012), are fully in line with this approach which consists in defending a self-segregation reserved for the rich. The discourse developed so far, particularly during the negotiations around the Southern District Plan, points at first to the continuous degradation of the rural character of Constantia, because of recent developments that fail to respect local architectural cohesion (Manning, 2004). In doing so, the CPOA is seeking to have a number of constraints ratified, particularly that concerning respecting upmarket architectural standards for any new building project. In parallel, the CPOA is fighting against the potential subdivision of existing plots into housing sites. Indeed, beyond its many parks, Constantia, with an average surface area of 2 000 m² per plot, has the lowest density compared to other Cape Town suburbs – except for the villages in the southern section of the Peninsula. The CPOA is also defending the landscape with its codes from the colonial period, by opposing the tree felling programme targeting “exotic” pine, oak and eucalyptus plantations, as part of a fynbos restoration programme[9] conducted by SanParks. Finally, the CPOA, since 2005, has been actively supporting the cultural heritage application of the Groot Constantia[10] historical wine farm with UNESCO, in the hope of seeing its action for singling out Constantia becoming legitimate.

 

 

2.2. Noordhoek : wilderness et aménités « villageoises » 

2.2. Noordhoek: Wilderness and “Village” Amenities 

 

 

La seconde logique de défense est plutôt représentative du sud de la Péninsule (Noordhoek, Kommetjie, Misty Cliffs, Scarborough). Elle prend place dans un espace géomorphologiquement séparé du reste de la métropole par des massifs montagneux. Ainsi, seuls trois axes routiers, dont un à péage, assurent la liaison entre le sud de la Péninsule et le reste de la métropole. Ce relatif isolement, à l’origine du différentiel d’urbanisation entre Nord et Sud, est plus récemment devenu un facteur d’attractivité mais a dans le même temps suscité une logique de différenciation et de refus d'assimilation à l’espace métropolitain (voir tableau n°1).

The second approach in defending self-segregation is more representative of the south of the Peninsula (Noordhoek, Kommetjie, Misty Cliffs and Scarborough). It takes place in an area which is geomorphologically separated by mountains from the rest of the metropolis. As such, only three major roads, including a toll road, link the south of the Peninsula to the rest of Cape Town. This relative isolation, which is the cause for the urbanisation differential between North and South, more recently became a factor of attractiveness and, at the same time, provoked a logic of differentiation and the refusal to be assimilated into the metropolitan area (see Table n°1).

Noordhoek, sur la côte ouest de la Péninsule, compte une population essentiellement blanche et aisée, en essor récent dû à la proximité du Cap. Cette évolution démographique est à l’origine de nouveaux projets de développement à la fois commerciaux et touristiques qui font l’objet d’une forte opposition. Ainsi, des associations de résidents, tel que le Noordhoek Environmental Action Group (NEAG), mettent en œuvre différentes méthodes de contestation, de la simple pétition à l’assignation en justice[11], qu’il s’agisse d’un projet de nouveau parking pour un centre commercial ou de la mise en place d’activités évènementielles dans un domaine viticole. Plus globalement, ces associations capitalisent sur les limites du développement de la Péninsule au regard du manque d’infrastructures existantes. Dans un contexte de tensions sur le marché foncier, elles militent pour un plus grand contrôle local. A ce titre, les associations de résidents du sud de la Péninsule se distinguent selon qu’elles adoptent une inclinaison plus environnementaliste ou plus agricole, privilégiant soit la préservation et la renaturation de la Péninsule - à travers la création de réseaux de réserves naturelles privées sur les propriétés comme autour de Red Hill pour lutter contre la prolifération des plantes invasives-, soit la protection des terres agricoles productives dans le cadre d’une agriculture de proximité - à travers la création d'exploitations alternatives comme Avalon Farm à Hout Bay ou Art Living Farm à Noordhoek (Caillot, 2013)..

Noordhoek, on the west coast of the Peninsula, has a mainly white and well-off population, recently in full development due to its proximity with Cape Town. The resulting population development led to new commercial as well as touristic development projects which are being highly opposed to. Residents’ associations, such as the Noordhoek Environmental Action Group (NEAG), are contesting such development in various ways, by issuing petitions or serving writs[11], whether these concern new shopping mall car parks or the implementation of activities for various events on wine farms. More globally, these associations capitalise on the limits of the Peninsula’s development, considering the lack of existing infrastructure. With tensions on the property market, residents’ associations argue for greater local control. For this reason, residents’ associations in the south of the Peninsula differ according to whether they adopt a more environmentalist or agricultural approach, thereby privileging either the conservation and renaturation of the Peninsula – by creating networks of private nature reserves around properties such as Red Hill, to fight against the proliferation of invasive plants, or the protection of productive agricultural land within the framework of local agriculture – by creating alternative farms such as Avalon Farm in Hout Bay, or Art Living Farm in Noordhoek (Caillot, 2013).

Le stade ultime à atteindre pour les autres associations de résidents est le statut de « conservation village », revendiqué par les habitants de Misty Cliffs et de Scarborough, mais non officiellement acté par l’autorité métropolitaine ; il s’accompagne d’un arsenal de mesures restrictives pour toute nouvelle construction (zonage, règles architecturales, mesures environnementales). La défense de l’entre-soi « villageois » va même plus loin avec des directives concernant l'éradication stricte des plantes invasives (sur les alien plants et la construction d’une identité nationale post-apartheid voir Giraut et al., 2005) et la régulation des pratiques de loisirs en pleine nature éditées par la Misty Cliffs Village Association[12].

The ultimate goal for the other residents’ associations is to reach the status of Conservation Village, as claimed by the residents of Misty Cliffs and Scarborough, although not officially endorsed by the metropolitan authority; this status comes with an array of restrictive measures concerning any new building (zoning, architectural rules and environmental measures). Defending “village” self-segregation goes even further with directives concerning the strict elimination of invasive plants (on alien plants and the building of a post-apartheid national identity, see Giraut et al., 2005), and the regulation of outdoor leisure activities edited by the Misty Cliffs Village Association[12].

 

 

2.3. La portée territoriale des actions menées par les associations de résidents

2.3. Territorial Impact of Actions Carried out by Residents’ Associations

 

 

Les objectifs poursuivis par les associations de résidents actives sur la Péninsule du Cap ont une portée territoriale évidente versée dans la critique d'un pouvoir métropolitain trop éloigné des enjeux du localisme. Ces associations militent toutes, à des degrés divers, pour influencer les décisions d'une gouvernance locale confisquée par l'autorité métropolitaine à la fin des années 1990, en investissant la sphère de la participation politique (sur Johannesburg voir  Bénit-Gbaffou Claire et al., 2012) elles organisent de nombreuses réunions publiques, et en commentant les différents documents d’urbanisme et de planification. La référence faite aux localités historiques dans les différentes dénominations des associations (Constantia POA, Hout Bay RRA, Noordhoek C, Kommetjie RRA, Scarborough VA, etc.) est un héritage des conseils locaux (local councils) actifs du temps de l'apartheid, au sein de l'autorité rurale du DIVCO.

The objectives pursued by residents’ associations active in the Cape Peninsula, obviously mean to impact on the territory, by criticising the metropolitan authority which is too far removed from local issues. All these associations campaign, to various degrees, with a view to influencing the decisions of a local governance that was confiscated by the metropolitan authority at the end of the 1990s, by becoming involved in the political sphere (on Johannesburg, see Bénit-Gbaffou Claire et al., 2012), by organising public meetings and by commenting on the various town planning documents. All reference made to historical villages in the different denominations of these associations (Constantia POA, Hout Bay RRA, Noordhoek C, Kommetjie RRA, Scarborough VA, etc.) is a legacy of local councils active during apartheid, within the DIVCO rural authority.

Les découpages post-apartheid en arrondissements (wards) n'ont pas totalement permis de ménager cet héritage aux yeux des résidents. Le ward en Afrique du Sud, en tant qu’échelon de base de la géographie politique post-apartheid sud-africaine, combine une représentation politique avec le conseiller d’arrondissement élu tous les 5 ans, et un processus de participation réalisé au sein du ward committee. Lors des découpages d’arrondissements les résidents ont tenté d’éviter de perdre leur « cohésion » spatiale. L’importance des territorialités au sein des wards est bien discutée par Gervais-Lambony (2008).

Post-apartheid divisions into wards did not completely make it possible to bring about this legacy in the eyes of the residents. The South African ward, as basic unit of post-apartheid municipal geography, combines a political representation with the ward councillor who is elected every five years, and a participation process carried out within the ward committee. When areas were being divided into wards, residents tried to avoid loosing their spatial “cohesion”. The significance of territoriality within wards is discussed at length by Gervais-Lambony (2008).

Si le découpage transitoire de 1996 a permis d'adjoindre un ward distinct par localité historique (en l'associant chacun à une zone d'habitat non blanc), les redécoupages métropolitains de 2001 puis de 2013 ont des contours sensiblement différents (carte n°5). Dans ces deux scenarii, Hout Bay et Constantia ont pu conserver leur cohérence territoriale (wards 74 et 62), voire leur exclusivité socio-raciale pour cette dernière. En revanche, le sud de la Péninsule s'est vu imposer un certain nombre de regroupements lors du dernier redécoupage de 2013, notamment le rattachement d’Ocean View, townhip coloured proche de Kommetjie, à Simons Town (ward 61).

While the ward division of 1996 led to the creation of distinct wards combining a historical village with a non-white area, the new 2001 then 2013 metropolitan divisions show significantly different contours (Map n°5). In both scenarios, Hout Bay and Constantia were able to maintain their territorial coherence (wards 74 and 62), or even their socio-racial exclusivity in the case of the latter. On the other hand, the south of the Peninsula was subjected to a number of groupings during the latest division in 2013, particularly where the Coloured township of Ocean View near Kommetjie, was attached to Simons Town (ward 61) (Table n°2).

 

Carte n°5 : Démarcations politiques et de planification dans la Péninsule du Cap

Map n°5: “Political” and “Planning” Divisions in the Cape Peninsula

carte_5 

 

 

Tableau n° 2: emboîtement des découpages « politiques » versus découpages « de planification» dans la Péninsule du Cap

Table n°2: “Political” and “Planning” Divisions in the Cape Peninsula

 tab 2

Les découpages des sous-districts métropolitains de planification expriment le même type de logique territoriale. Constantia et Hout Bay possèdent chacun leur propre sous-district d'aménagement et d'urbanisme (en rose et mauve sur la carte n°5), alors que le sud de la Péninsule est composé d'un seul et même sous-district discontinu (The Far South, en orange sur la carte) malgré la diversité des profils des localités qui le composent. Les visions développées par le dernier document de planification métropolitain (City of Cape Town (a & b), 2011) vont en partie dans le sens des revendications des associations de résidents étudiées, manière pour l'autorité métropolitaine de ne pas se mettre à dos certains contribuables influents. Ces visions sont respectivement :

The divisions of the metropolitan planning sub-districts present the same type of territorial logic. Constantia and Hout Bay each have their own planning sub-district (in pink and purple on Map n°5), while the south of the Peninsula is made up of one and the same broken sub-district (The Far South, in orange on the map) despite the diversity of village profiles making it up. The visions developed in the last Cape Town Spatial Development Framework (City of Cape Town (a&b), 2011) are partly following the claims of the residents’ associations under study, which is a way for the metropolitan authority to avoid turning influential tax payers against it. These visions are, respectively:

A distinctive area of rural capeness, that celebrates unique valley landscapes, productive lands, living environments, and local recreational and tourism experiences, connected to neighbouring areas and the rest of the city through accessible routes and public transport” pour Constantia; (City of Cape Town (a), 2011, p.122);

A distinctive area of rural capeness, that celebrates unique valley landscapes, productive lands, living environments, and local recreational and tourism experiences, connected to neighbouring areas and the rest of the city through accessible routes and public transport” for Constantia (City of Cape Town (a), 2011, p.122);

An urban valley area renowned for its natural and cultural beauty, with a well-defined and protected natural environment, and recognised for its distinct semi-isolated valley sense of place and living experiences within the metropolitan region, vibrant tourism and service orientated economy, and with world class natural amenity and historical heritage areas accessible to all city inhabitants” pour Hout Bay (City of Cape Town (a), 2011, p 119) ; et

An urban valley area renowned for its natural and cultural beauty, with a well-defined and protected natural environment, and recognised for its distinct semi-isolated valley sense of place and living experiences within the metropolitan region, vibrant tourism and service orientated economy, and with world class natural amenity and historical heritage areas accessible to all city inhabitants” for Hout Bay (City of Cape Town (a), 2011, p 119); and

An area renowned for its natural and cultural beauty, with a well-defined and protected natural environment, and recognised for its collection of areas of distinct sense of place and urban character, vibrant tourism and service orientated economy, and with world class natural amenity areas accessible to all city inhabitants” pour le Far South. (City of Cape Town (a), 2011, p 133)

An area renowned for its natural and cultural beauty, with a well-defined and protected natural environment, and recognised for its collection of areas of distinct sense of place and urban character, vibrant tourism and service orientated economy, and with world class natural amenity areas accessible to all city inhabitants” for the Far South (City of Cape Town (a), 2011, p 133).

Si la possibilité "d'accessibilité par tous les habitants" est explicitée clairement pour les sous-districts d'Hout Bay et du Far South, elle ne l'est pas pour Constantia qui se doit seulement d'être "connectée au reste de la ville" pour les flux de touristes ou de travailleurs, tout en devant conserver "son identité rurale péninsulaire" ("rural capeness"). La vision préconisée pour Hout Bay reconnaît l'importance du patrimoine historique défendu par certains de ses habitants ("historical heritage"). En revanche, la vision correspondant au sous-district du sud de la Péninsule apparaît comme relativement "fourre-tout" et trop peu spécifique pour éventuellement contraindre des projets de développement qui n'iraient pas dans le sens des priorités défendues par certaines associations de résidents. Les découpages politiques, électoraux et d'aménagement semblent finalement aller dans le même sens : statu quo pour le centre de la Péninsule (Constantia et Hout Bay) et plus grande ouverture aux changements pour le sud de la Péninsule. Par conséquent, la portée territoriale des actions des résidents semble sous-tendue par ces agencements territoriaux édictés par l'autorité métropolitaine.

While the possibility of access by all residents is clearly explained for the sub-districts of Hout Bay and the Far South, it is not the case for Constantia which only ought to be “connected to the rest of the city” through flows of tourists or labourers, while maintaining its rural Capeness. The vision advocated for Hout Bay recognises the importance of the historical heritage defended by some of its residents. On the other hand, the vision of the Far South sub-district comes across as being not specific enough to potentially constrain development projects that do not match the priorities defended by certain residents’ associations. In the end, political, electoral and planning divisions seem to go along the same lines: status quo for the centre of the Peninsula (Constantia and Hout Bay), and greater openness to changes for the Far South. As a result, the territorial impact of residents’ actions seems to be underlain by the territorial layouts decreed by the metropolitan authority.

En effet, à Constantia comme à Hout Bay on peut noter une collusion très forte entre les associations de résidents et les conseillers d'arrondissements. Ainsi, Mmes B et H, élues locales (parti Democratic Alliance) des wards 62 et 74, travaillent de concert avec la CPOA et HBRRA. Quant à la plus grande propriétaire foncière de Constantia[13], membre de la CPOA et de l'association de protection des Constantia Green Belt, elle est très proche à la fois de la conseillère d'arrondissement et de certains services administratifs de la ville du Cap. Elle cherche à éviter le démembrement foncier de Constantia tout en militant pour une ouverture touristique raisonnée. La superposition presque parfaite des périmètres de l'arrondissement, du sous-district d'aménagement et de l'espace d'action des associations permet de faire cause commune et d’avancer certains dossiers. C'est grâce à ce lien politique fort que Constantia a, pour le moment, réussi à éviter la construction de logements bon marché sur un terrain public appartenant au gouvernement provincial[14]. Dans ce cas, le vote pour le conseiller d'arrondissement - appartenant pourtant au même parti DA que le maire de la métropole du Cap - s'explique par une logique de localisme.

Indeed, in Constantia as in Hout Bay, there is very high collusion between residents’ associations and ward councillors. As such, Mrs B and H, the DA local councillors for wards 62 and 74, work in co-operation with the CPOA and the HBRRA. As to the owner of the largest property in Constantia[13], she is a member of the CPOA and Constantia Green Belt, and is very close to the ward councillor and certain administrative departments of Cape Town. Her goal is to prevent land in Constantia from being broken-up while arguing for reasoned tourist openness. The almost perfect superimposition of the ward perimeters, the planning sub-district and margin of action of residents’ associations, lead to make common cause with one another and speed up certain issues. It is thanks to this strong political link that Constantia managed – for the time being – to prevent the building of low cost housing on public land belonging to the provincial government [14]. In this case, the vote for the ward councillor, who like the Mayor of Cape Town is also a DA member, can be explained by a logic based on localism.

Dans le sud de la Péninsule, les enjeux sont différents et les liens entre associations et élus apparaissent plus distendus voire critiques. D'une part les associations de résidents et de protection environnementale sont nombreuses et divisées (NC, NEAG, KRRA, MCVA, SVA, RH, etc.) car poursuivant des objectifs divers (gestion des enjeux micro-locaux ou militantisme environnemental), et d'autre part les conseillers d'arrondissements doivent gérer un territoire plus vaste que celui des périmètres associatifs, riche d'enjeux électoraux. Ainsi, compte tenu de la croissance soutenue de la population africaine à Masiphumelele, il existerait une possibilité de bascule de l'arrondissement 69 du DA vers l'ANC lors des prochaines élections locales en 2016. Par conséquent, la conseillère d'arrondissement DA, Mme P, doit gagner des nouveaux soutiens à Masiphumelele et ne peut donc pas répondre à toutes les sollicitations des associations de résidents blancs. De plus, ces dernières sont partagées entre la nostalgie du localisme passé (NC, KRRA, MCVA, SVA) et le renforcement de la préservation de la nature (NEAG, RH) face à un parc national dont les méthodes sont souvent critiquées (Guyot, Dellier, Cerbelaud, 2014).

In the Far South, issues are different and the links between associations and ward councillors appear looser or even critical. On the one hand, there are many residents’ and conservationists’ associations (NC, NEAG, KRRA, MCVA, SVA, RH, etc.) with different agendas (management of micro-local issues or environmental activism), and on the other hand ward councillors must manage a territory which is vaster than the perimeters of the associations and which has high implications during elections. Considering the growth of the African population in Masiphumelele, there is a possibility that ward 69 with a DA majority becomes ANC during the next local elections in 2016. As a result, DA ward councillor Mrs P needs to win over new support from Masiphumelele residents if she is to win the elections, and as such cannot meet all the demands of white residents’ associations. Moreover, these associations are divided between those who yearn for past localism (NC, KRRA, MCVA, SVA) and those who would like to see nature conservation being reinforced (NEAG, RH), especially when considering the way the Table Mountain National Park is managed, which is often the subject of criticisms (Guyot et al., 2014).

La portée politique des associations péninsulaires est donc multiscalaire. Tentées par le localisme face à une autorité métropolitaine lointaine et autoritaire, elles utilisent cependant les outils politiques et de planification métropolitains pour arriver à leurs fins, ou les contournent en s'attaquant directement à la représentation nationale incarnée par le parc.

The political impact of residents’ associations in the Peninsula is multi-scaled. Tempted by localism against the distant and authoritarian metropolitan authority, they nonetheless use political as well as metropolitan planning tools to achieve their ends, or go around problems by directly attacking the national representation incarnated by the national park.

 

 

Conclusion

Conclusion

 

 

Le « droit au village » dans la Péninsule du Cap peut se comprendre comme un ensemble de revendications visant à défendre plusieurs types de ruralité, largement héritées, basées sur l’entre-soi et le sense of place, et à réclamer leur protection, extension, institutionnalisation et patrimonialisation. La mobilisation territoriale, autour d’une certaine idée de la ruralité, par les associations de résidents de la Péninsule du Cap a pour objectif principal la défense de cet entre-soi blanc et aisé. Nous avons montré que cette ruralité s'ancrait à la fois dans l'histoire, dans les lieux et dans le paysage de la Péninsule.

The “right to the village” in the Cape Peninsula can be understood as a set of claims aiming at defending several and mostly inherited types of rurality, based on self-segregation and a sense of place, and at demanding their protection, extension, institutionalisation and heritagisation. The objective of the territorial mobilisation based on the notion of rurality by residents’ associations in the Cape Peninsula, is mainly to defend self-segregation. We have shown that this rurality is rooted in history as well as in the places and landscapes of the Peninsula.

La nostalgie du localisme politique au sein d'une autorité de gestion rurale durant l'apartheid, la multiplication post-apartheid des toponymes faisant une référence directe aux villages et à la ruralité et les stratégies de conservation et de renforcement d'un cachet « campagnard » dans le paysage constituent les principaux éléments de cette nouvelle géographie rurale de la Péninsule du Cap. Des stratégies de mobilisation politique sont mises en place par les différentes associations de résidents afin de pouvoir construire, légitimer et défendre la ruralité d'un territoire encore perçu dans un fonctionnement autonome de la métropole du Cap. Si les méthodes de mobilisation politique semblent identiques pour l'ensemble des associations de résidents autour d'une surveillance critique sur les propositions et les documents d'aménagement de la métropole, d'une participation active aux forums participatifs et de l'organisation de réunions publiques thématiques, en revanche les référents mobilisés et les stratégies d'alliances électorales différent.

Yearning for political localism such as the former Cape Divisional Council, the post-apartheid multiplication of toponyms referring directly to villages and rurality, as well as conservation and rural reinforcement strategies, constitute the main elements of the new rural geography of the Cape Peninsula. Political mobilisation strategies are implemented by various residents’ associations in order to build, legitimise and defend rurality in a territory which is still perceived as operating autonomously from the Cape Town metropolis. While political mobilisation methods seem identical for all residents’ associations, involving the critical monitoring of proposals and Cape Town spatial development framework, active participation in forums as well as the organisation of public thematic meetings, on the other hand the referents being mobilised and the electoral alliance strategies are different.

Constantia et Hout Bay sont des localités bien connectés au continuum urbain de la métropole et semblent intégrés à sa logique de démarcation politique (wards homogènes) et planificatrice (sous-districts homogènes). Certains de leurs habitants défendent la patrimonialisation de la ruralité contre les autres populations, pauvres et plutôt non blanches, avec le soutien affirmé des conseillers municipaux d'arrondissement. On est là dans une stratégie d'entre-soi, bien intégrée à la politique métropolitaine et qui laisse peu de place aux motivations des populations défavorisées[15]. En revanche, les associations de résidents du sud de la Péninsule sont plus nombreuses et diverses, et défendent surtout l'autonomisation rurale par rapport à la métropole et une protection renforcée de la nature face à un parc national souvent éloigné de leurs préoccupations micro-locales. L'évolution viendra probablement du renforcement de la capacité des résidents les plus modestes à faire valoir leurs propres droits à la nature (garantis par un parc national for all et forever, voir Belaidi, 2011) et à la ville, par le biais des ward committees, et à rentrer dans un jeu politique encore trop peu représentatif de la diversité des enjeux, ultime héritage des longues années d'apartheid.

The towns of Constantia and Hout Bay are connected to the urban continuum of the metropolis and seem integrated into the logic of political (homogeneous wards) and planning (homogeneous sub-districts) demarcation. Some of their inhabitants defend the heritagisation of rurality against other population groups who are poor and mostly non-white, with the confirmed support of ward councillors. This is a self-segregation strategy, well integrated into metropolitan politics and which leaves little place to the motivations of the disadvantaged populations[15]. On the other hand, residents’ associations in the Far South are found in greater numbers and diversity; they seek rural autonomy from Cape Town in particular, and reinforced nature conservation, especially in the face of the Table Mountain National Park which is often removed from their micro-local preoccupations. Any potential evolution will most likely come from the capacity building of modest residents seeking to enforce their right to nature – as guaranteed by the national park “for all and forever” (see Belaidi, 2011) – and to the city via ward committees, and to enter a political game still not sufficiently representative of the diversity of issues, which are the ultimate legacy of long years of apartheid.

Remerciements : Les auteurs souhaitent remercier Fabien Cerbelaud pour sa participation à la réalisation des cartes de cet article.

Acknowledgments: The authors would like to thank Fabien Cerbelaud for helping them to produce the maps for this article.

A propos des auteurs : Sylvain Guyot et Julien Dellier sont Maitres de Conférences à l'Université de Limoges, UMR GEOLAB Antony Caillot  est géographe à l'Université de Limoges.

About the authors: Sylvain Guyot and Julien Dellier are lecturers at Limoges UniversityUMR GEOLAB, Antony Caillot is geographer at Limoges University

Pour citer cet article : Sylvain Guyot, Julien Dellier, Antony Caillot, "« Our rural sense of place » Ruralité et stratégies de défense de l’entre-soi dans la péninsule du Cap (Afrique du Sud)" justice spatiale | spatial justice, n° 7 janvier 2015, http://www.jssj.org/

To quote this article: Sylvain Guyot, Julien Dellier, Antony Caillot, « « Our rural sense of place » Rurality and Strategies of Self-Segregation in the Cape Peninsula (South Africa) » justice spatiale | spatial justice, n° 7 janvier 2015, http://www.jssj.org/

 

 

[1] Nommer les groupes “raciaux” en Afrique du Sud est un problème de terminologie comme de politique. La classification mise en place par l’apartheid comprenait les « Blancs  » (Sud-Africains d’origine européenne, dont les Afrikaners et les Sud-Africains anglophones), les « Indiens  » (Sud-Africains d’origine indienne), « Africains  » (Sud-Africains d’origine africaine) et « Coloureds  » (traduit par Métis ou Colorés, un groupe hétérogène comprenant les personnes d’ascendance mixte et tous ceux ne rentrant pas dans les catégories précédentes). Cette classification a été fondatrice d’identités et reste utilisée dans le cadre du recensement, ce qui explique pourquoi les chercheurs continuent de l’utiliser tout en la condamnant.

[1] Naming “racial” groups in South Africa is a terminological as well as a political issue. The classification established by apartheid included “Whites” (South Africans of European origin, including Afrikaners and English-speaking South Africans), “Indians” (South Africans of Indian origin), “Africans” (South Africans of African origin) and “Coloured” (a heterogeneous group including people of mixed ancestry and all those who did not fit in the former categories). This classification was at the basis of identities and remain used for the census, the reason why researchers continue to use it while condemning it.

[2] Sur la période 1996-2011, la population coloured a crû de 28 % et la population blanche de 7,8 %.

[2] Over the 1996-2011 period, the coloured population increased by 28 % and the white by 7,8 %.

[3] En 2011, 40,8 % des foyers coloureds et 15,3 % des foyers blancs avaient des revenus inférieurs ou égaux à 3200 ZAR.

[3] In 2011, 40,8 % of Coloured households and 15,3 % of white households had incomes less than or equal to ZAR3 200,00.

[4] Les Cape Flats, qui s’étendent sur la plaine côtière au sud-est du Cap, ont été utilisés par le pouvoir d’apartheid comme zone d’implantation des populations non blanches et restent aujourd’hui marqués par cet héritage, de nombreuses extensions informelles s’étant greffées aux township planifiés durant l’apartheid.

[4] The Cape Flats, stretching on the coastal plain in the South-East of Cape Town, were used by the apartheid regime as a settlement zone for non-white populations and today remain marked by this legacy, with many informal extensions having developed around the townships planned during apartheid.

[5] http://www.scenicsouth.co.za/civic-community/our-communities/masiphumelele, accédé le 30/05/2013.

[5] http://www.scenicsouth.co.za/civic-community/our-communities/masiphumelele, visited on 30/05/2013.

[6] http://www.lonelyplanet.com/south-africa/cape-town/restaurants/deli/noordhoek-village-farmstall, accédé le 13/11/2013.

[6] http://www.lonelyplanet.com/south-africa/cape-town/restaurants/deli/noordhoek-village-farmstall, visited on 13/11/2013.

[7] Le style architectural Cape Dutch est typique de la colonie du Cap au 17ème siècle, les canons de ce style reposent sur a mise en valeur de fronton décoratif, la peinture des murs à la chaux et le recours à des toits de chaume.

[7] The Cape Dutch architectural style is typical of the Cape Colony in the 17th century, the canons of this style relying on the use of ornately rounded gables, whitewashed walls and thatched roofs.

[8] A l’image du déplacement des ouvriers agricoles du domaine de Steenberg, autrefois logés sur le domaine même, donc à Constantia, et aujourd’hui déplacés à Westalke, au sein des Cape Flats.

[8] Like the farm workers who used to live on the Steenberg farm in Constantia where they worked and who, today, have been moved to Westalke on the Cape Flats.

[9] Le fynbos est l’appellation générique de différentes formes de maquis présentant une biodiversité extrêmement riche. Ces formations sont en effet composées en grande partie d’espèces endémiques à la région floristiques du Cap.

[9] The generic name ‘fynbos’ refers to scrub vegetation with an extremely rich biodiversity. These formations are made up mainly of species endemic to the floristic region of Cape Town.

[10] Le domaine Groot Constantia est issue du partage de la propriété du commandeur du Cap puis gouverneur de la colonie néerlandaise du Cap Simon Van der Stel qui participa à faire de Constantia le berceau du vignoble sud-africain.

[10] Groot Constantia stems from the division of the property of the last Commander and first Governor of the Cape Colony, Simon Van der Stel, who contributed to making of Constantia the cradle of the vineyards of South Africa.

[11] Pour plus de détails voir http://www.neag.org.za/, accédé le 26 juin 2014.

[11] For more details, see http://www.neag.org.za/, visited on 26 June 2014.

[12] (http://www.mistycliffs.org.za/).

[12](http://www.mistycliffs.org.za/).

[13] Entretien du 8 avril 2014 à Constantia avec N., Alphen Hôtel.

[13] Interview on 8 April 2014 in Constantia with N., Alphen Hotel.

[14] La province est gouvernée par la même mouvance politique que l'arrondissement de Constantia et la ville du Cap, le DA.

[14] The province is governed by the same political party as the ward of Constantia and the municipality of Cape Town, i.e. the DA.

[15] Sauf quand elles se saisissent des cadres nationaux de la restitution foncière (rétrocession à Constantia en mai 2014 au profit de familles Coloured dépossédées dans les années 1960) ou que certains résidents blancs font sécession [ce terme est)il le bon ?]en leur faveur (scission récente d'une des associations de contribuables d'Hout Bay pour y intégrer les résidents les plus pauvres).

[15] Except when they call on the Restitution of Land Rights Act (retrocession in Constantia in May 2014, to the benefit of Coloured families dispossessed during the 1960s), or when white residents cede their land in their favour (recent cession by a tax payers’ association in Hout Bay to include the poorest residents).

Bibliographie

References

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