L’accompagnement à l’entrepreneuriat dans les « quartiers prioritaires », une politique publique de justice spatiale ?

Support for entrepreneurship in “priority neighbourhoods”, a public policy for spatial justice?

Introduction

Introduction

La politique de la ville pour une juste égalité des chances

Urban policy for fair equality of opportunity

La politique de la ville est une politique nationale territorialisée qui entend réduire la fracture sociale, économique et urbaine entre les 1 514 quartiers les plus pauvres de France et leur territoire environnant. Lors d’un comité interministériel des villes, la ministre de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales a revendiqué un « impératif de justice sociale et territoriale » envers les quartiers prioritaires (QP) (gouvernement, 2021, p. 4). Elle articule la notion de justice à l’égalité des chances qui doit devenir « une réalité pour les 5,5 millions d’habitants des quartiers » afin de permettre leur émancipation (ibid.). Valorisée par les acteurs politiques depuis la fin des années 2000, « l’égalité des chances » désigne la possibilité pour tous d’occuper les meilleures places dans la société selon le principe de la méritocratie (Dubet, 2010). Luttant contre les inégalités spatiales pour atteindre « l’égalité des chances pour tous », l’État applique une politique d’équité territoriale[1] en octroyant des financements et des dispositifs spécifiques aux QP dont la mise en application revient aux intercommunalités. Depuis une réforme de la politique de la ville en 2014, des mesures de soutien à l’entrepreneuriat sont mises en œuvre. Il s’agit d’aider des particuliers à constituer et à développer une entreprise en leur apportant compétences, financements et réseaux professionnels.

France’s politique de la ville (urban policy) is a territorial policy intended to reduce the social, economic and urban divide between France’s 1,514 poorest areas and their surrounding areas. At a meeting of the interministerial municipalities committee, the Minister for Cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales (Territorial Cohesion and Local Authority Relations) spoke of an “imperative of social and territorial justice” targeting “quartiers prioritaires” (QP; priority areas) (gouvernement, 2021, p. 4). She linked the notion of justice with equality of opportunity, arguing that it should become “a reality for the 5.5 million inhabitants of these areas” as a path to emancipation (ibid.). Much emphasised by politicians since the late 2000s, “equality of opportunity” refers to the possibility for everyone to achieve a decent position in society on the principle of meritocracy (Dubet, 2010). In its struggle against spatial inequalities in the pursuit of “equal opportunities for all”, the state applies a policy of territorial fairness[1] by granting funds and specific instruments to the QPs, to be implemented by the joint intermunicipal authorities. Since the urban policy reform of 2014, this strategy has included measures to support entrepreneurship. Their intent is to help individuals to set up and develop a business by providing skills, funding, and professional networks.

La position du gouvernement révèle ainsi une certaine conception de la justice dans la politique de la ville, à savoir l’égalité des chances pour l’émancipation des individus. Elle se concrétise par des mesures ciblées spatialement, comme le soutien à la création d’entreprise en QP.

The government’s position thus reveals a certain conception of justice in urban policy, that is, equality of opportunity as a means to individual emancipation. It takes the form of spatially targeted measures, such as the support for business creation in deprived areas.

 

 

Interroger l’égalité dans la mise en œuvre de l’accompagnement à l’entrepreneuriat en QP

Exploring equality in the implementation of support for business creation in QP.

Face au discours « égalitariste » du gouvernement, l’article interroge la justice spatiale dans l’accompagnement entrepreneurial en QP. Il s’inscrit dans le champ de la géographie des inégalités en étudiant le rôle de l’action publique territoriale dans la production de ces dernières. D’ailleurs, des travaux de recherche urbaine montrent les effets nuancés de la territorialisation de la politique de la ville sur la réduction des inégalités sociales et spatiales (Tissot et Poupeau, 2005). Au contraire, la territorialisation discrimine même parfois les résidents des QP en les assignant à une identité territoriale dévalorisée (Kirszbaum, 2016). L’article examine ainsi les actions de soutien à l’entrepreneuriat pour réduire les inégalités. Plus précisément, il analyse l’accès des habitants des QP aux structures d’accompagnement et aux ressources qu’elles proposent. L’étude de l’accès dépasse l’approche par la répartition spatiale chère aux politiques d’aménagement fondées sur la justice distributive. Elle intègre la capacité des personnes à utiliser les ressources existantes en fonction de facteurs individuels, sociaux et territoriaux (Fol et Gallez, 2013). Cette double entrée rappelle la définition de la justice spatiale d’Edward Soja : « la distribution équitable et juste dans l’espace des ressources socialement valorisées et des possibilités de les exploiter » (2009, p. 3).

This article explores the government’s “egalitarist” discourse with an examination of spatial justice in the support for entrepreneurship in QP. It draws on the geography of inequalities, a field that studies the role of territorial public action in the production of inequalities. In fact, urban research studies show that the territorialisation of urban policy has mixed outcomes in reducing social and spatial inequalities (Tissot and Poupeau, 2005). Indeed, in some cases territorialisation exacerbates discrimination for residents of deprived areas by assigning them a devalued territorial identity (Kirszbaum, 2016). The aim of the article, therefore, is to examine the impact of support measures for entrepreneurship designed to reduce inequalities. More specifically, it analyses the access that QP residents have to support structures and the resources they offer. In studying the question of access, it goes beyond the approach based on spatial distribution espoused in urban planning policies founded on distributive justice. It considers the way individual, social, and territorial factors influence the capacity of people to use the resources offered (Fol and Gallez, 2013). This dual entry point recalls the definition of spatial justice given by Edward Soja: “the fair and equitable distribution in space of socially valued resources and opportunities to use them” (2009, p. 3).

L’accès aux ressources pour créer une entreprise en QP est un thème peu traité. Le fait que la réforme de 2014 soit récente et la segmentation disciplinaire limitent les travaux en politique de la ville sur l’entrepreneuriat et ceux en entrepreneuriat sur les QP. Les géographes et les sociologues spécialistes de la politique de la ville étudient surtout la rénovation urbaine et le logement autour des enjeux de mixité et de cohésion sociales, ou les processus de participation et de politisation. Dans ces analyses, le volet économique est minoritaire et est surtout appréhendé à travers la mobilité à l’emploi et les politiques de zonage (L’Horty et Morin, 2016). Il existe néanmoins une thèse d’aménagement qui étudie l’ancrage des entreprises dans les QP (Hercule, 2022) et deux enquêtes en sciences de gestion qui examinent le soutien à l’entrepreneuriat auprès de jeunes (Trindade-Chadeau, 2019) ainsi qu’un dispositif d’accompagnement à l’entrepreneuriat social de femmes en QP (Notais et Tixier, 2018).

Access to resources for business creation in QPs is a subject that has received little scholarly attention. Because of the recency of the 2014 reform and disciplinary silos, both urban policy studies on entrepreneurship and entrepreneurship studies on priority neighbourhoods have been limited. Geographers and sociologists specialising in urban policy primarily study urban renovation and housing, with a focus on issues of social mixing and cohesion, or processes of participation and politicisation. In these analyses, the economic aspect plays a minor part, largely restricted to questions of job mobility and zoning policies (L’Horty and Morin, 2016). Nevertheless, there is one urban planning thesis on the presence of economic activities in QPs (Hercule, 2022) and two management science studies that examine entrepreneurship support targeting young people (Trindade-Chadeau, 2019), as well as a system of support for women’s social entrepreneurship in QPs (Notais and Tixier, 2018).

Pourtant, les discours politico-médiatiques traduisent un fort engouement pour l’entrepreneuriat comme outil d’égalité en QP. Dans une allocution de 2018 intitulée « Une chance pour chacun », le président Emmanuel Macron prône une « politique de l’émancipation » par la « réussite économique ». Un an plus tôt, à Tourcoing, il revendiquait déjà un « droit à la politique économique » pour « les gens des quartiers » dans une prise de parole sur la « mobilisation nationale pour les villes et pour les quartiers ». Cet enthousiasme s’inscrit dans un contexte institutionnel plus large, porté notamment par le Fonds social européen et la Banque mondiale qui estiment que l’accès des personnes pauvres à l’entrepreneuriat réduirait le chômage, améliorerait le développement et leurs conditions de vie (Narayan, 2005).

On the other hand, political and media content indicate high levels of enthusiasm about entrepreneurship as a tool of equality in deprived areas. In a short 2018 speech entitled “Une chance pour chacun” (An opportunity for everyone), President Emmanuel Macron called for a “policy of emancipation” through “economic success”. A year earlier, in Tourcoing, he had already spoken of a “right to economic policy” for “people in deprived areas” in a speech on “national mobilisation for cities and neighbourhoods”. This enthusiasm is embedded in a broader institutional context, notably represented by the European Social Fund and the World Bank, which believe that providing access to entrepreneurship for poor populations would reduce unemployment and improve their development and living conditions (Narayan, 2005).

L’article interroge ces discours publics qui affirment que la création d’entreprise représente un moyen d’ascension sociale pour les populations précaires et alimente le débat scientifique à ce sujet. L’approche libérale considère que l’entrepreneuriat renforce les capacités d’action des individus (Narayan, 2005) tandis que l’approche critique établit au contraire qu’il perpétue les inégalités structurelles en les responsabilisant (Abdelnour, 2017).

The article questions these public claims that business creation represents a means of upward social mobility for vulnerable populations and feeds into scientific debate on the subject. The liberal view is that entrepreneurship reinforces the capacity for action of individuals (Narayan, 2005), whereas the critical approach shows conversely that it perpetuates structural inequalities by placing the burden of responsibility for them on individuals (Abdelnour, 2017).

 

 

Une enquête de terrain aux méthodes qualitatives

A field study using qualitative methods

L’accès aux ressources entrepreneuriales en QP invite à étudier qui, où, et selon quelles modalités les structures accompagnent à la création d’entreprise. Les réponses apportées dans cet article s’appuient sur deux terrains d’une durée d’un an et demi. Le premier terrain est une association située à Saint-Denis (93) et nommée « la Maison de l’initiative économique locale » (Miel). Elle aide toute personne qui le souhaite à créer ou à développer son entreprise, si elle est implantée à Plaine Commune. La Miel est composée de cinq conseillers, dont l’un gère la Pépinière, une structure d’accompagnement dédiée aux projets à fort potentiel de développement. Un dispositif de suivi des entrepreneurs des 15 QP de l’agglomération nantaise, dont le nom est « Osez entreprendre », constitue le second terrain. Ce dispositif est composé de quatre structures qui accompagnent et/ou financent tout individu situé en QP à monter et faire croître son entreprise (figure 1).

Access to entrepreneurial resources in QPs raises the question of where and how the structures support to business creation, and who benefits. The answers provided in this article draw on two 18-month field studies. The first investigates a nonprofit organisation located in Saint-Denis (93) called the “Maison de l’initiative économique locale” (Miel)—the centre for local economic initiative. It supports anyone interested in setting up or developing a business located in Plaine Commune. The Miel consists of five advisers, one of whom manages the Pépinière, a support structure dedicated to business projects with high development potential. The second field study looks at a structure called “Osez entreprendre”, which supports business creators in the 15 QPs located within the Nantes urban area. This entity consists of four structures that support and/or provide funding for any individual located in a QP in setting up and growing their business (figure 1).

tableau de présentation des structures incluses dans l’enquête

Figure 1 : Présentation des structures incluses dans l’enquête © Loréna Clément

Figure 1: Presentation of the structures studied in the survey © Loréna Clément

L’enquête repose sur un triptyque méthodologique (observations-entretiens-littérature grise). J’ai mené une quarantaine d’observations de nature diverse : réunions techniques comme un comité de pilotage du dispositif nantais, sensibilisations à l’entrepreneuriat, séances de tractage sur un marché, formations collectives, soirées de mise en réseau, etc. Les événements étaient organisés par les structures étudiées, leurs partenaires, leurs concurrents, ou des acteurs nationaux pour contextualiser. Ces observations permettent d’analyser les lieux de l’entrepreneuriat et les profils des participants. J’ai, par ailleurs, conduit plus d’une centaine d’entretiens avec deux types d’enquêtés : une soixantaine avec des acteurs institutionnels du soutien à l’entrepreneuriat ou de la politique de la ville, ou des deux, à différents échelons[2], et une cinquantaine avec des entrepreneurs accompagnés par les structures examinées. Les entretiens étaient semi-directifs avec les acteurs institutionnels, pour recueillir des informations factuelles et discursives, tandis que j’ai privilégié les récits de vie avec les entrepreneurs pour les laisser aborder les thèmes qui leur sont chers et pour comprendre le parcours biographique dans lequel s’enracine leur activité. Les entretiens s’organisaient en trois pôles : le profil du répondant et de son activité, son ancrage partenarial et territorial, ses conceptions de l’entrepreneuriat[3]. En complément des observations et des entretiens, j’ai épluché la littérature grise : conventions d’application de l’accompagnement à la création d’activité en QP, bilans d’activité des structures, plaquettes de communication, etc. Ces documents produits par les enquêtés offrent des informations factuelles et des représentations plurielles de l’entrepreneuriat en QP.

The study employs three methods (observations, interviews, grey literature). I conducted some 40 observations of different kinds: technical events such as a meeting of the steering committee of the Nantes structure, entrepreneurship awareness-raising events, leafleting campaigns on a market, group training sessions, networking events, etc. The events observed were organised by the structures themselves, their partners, their competitors, or national actors to provide context. The aim of these observations was to analyse the entrepreneurship sites and the profiles of the participants. In addition, I conducted more than a hundred interviews with two types of subjects: around 60 with institutions involved in supporting entrepreneurship or urban policy, or both, at different levels,[2] and some 50 with entrepreneurs who were clients of the support structures. The interviews with the institutional actors were semistructured, designed to collect factual and discursive information, whereas I focused on life narratives with the entrepreneurs to give them the opportunity to talk about the subjects that were important to them and to understand the biographical trajectory in which their activity is rooted. Each interview was divided into three components: the profile of the respondents and their business, their partnership and territorial attachments, their conceptions of entrepreneurship.[3] In addition to the observations and interviews, I combed through the grey literature: protocols for the application of entrepreneurship support in QPs, activity reports of the support structures, advertising brochures, etc. These documents, emanating from the survey subjects, provide factual information and multiple representations of entrepreneurship in QPs.

L’article montre des inégalités d’accès aux structures d’accompagnement et propose une vision renouvelée de la relation entre justice et soutien entrepreneurial portée par une logique procédurale plus que distributive (Young, 1990). Avant cela, il examine en quoi les acteurs publics articulent la justice spatiale à l’accompagnement entrepreneurial en QP.

This article reveals inequalities of access to the support structures and proposes a new vision of the relationship between justice and entrepreneurial support, guided by procedural rather than distributive principles (Young, 1990). Before that, it examines how the public actors make the connection between spatial justice and entrepreneurial support in deprived areas.

 

 

Une répartition spatiale du soutien à l’entrepreneuriat pour l’égalité des chances des individus

Spatial distribution of entrepreneurship support: pursuing equality of opportunity for individuals

L’égalité des chances par un entrepreneuriat méritocratique

Equality of opportunity by meritocratic entrepreneurship

En soutenant la création d’activité en QP, le gouvernement vise l’égalité des chances. À l’origine du régime de l’autoentreprise en 2009, le secrétaire d’État Hervé Novelli considère que l’État doit procurer un « permis d’entreprendre pour tous » afin que « chacun [ait] le pouvoir de s’élever socialement par ses propres moyens » (Abdelnour, 2017, p. 152) : « quel meilleur ascenseur social que l’entreprise ? Mais l’autoentreprise fait mieux encore : ne nécessitant ni moyens, ni diplômes, ni relations, elle met à égalité un jeune de banlieue et un retraité du 16e arrondissement. Ce qui compte, c’est l’idée et la “niaque” mise en œuvre pour faire prospérer le projet. Tout le monde a la même chance » (ibid., p. 74). Dans sa prise de parole à Tourcoing, dix ans plus tard, Emmanuel Macron perpétue l’idéologie de la méritocratie par l’entrepreneuriat. Il entend renverser « cette société statutaire où la réussite est pour une aristocratie économique ». Lors du discours « Une chance pour chacun », il prône une « politique de l’émancipation » par l’entrepreneuriat notamment, où « chacun puisse aller vers ce à quoi il aspire, et qu’il n’y ait plus cette assignation à résidence, sociale ou territoriale ».

In supporting business creation in QPs, the government’s aim is to promote equality of opportunity. At the time of the introduction of the self-employment regime in 2009, Secretary of State Hervé Novelli took the view that the state should establish an “enterprise licence for all” so that “everyone [has] the power to pursue upward social mobility for themselves” (Abdelnour, 2017, p. 152): “what better social elevator is there than business? But freelance working can do even more: requiring neither money, nor qualifications, nor connections, it puts a youngster from a housing estate and a pensioner from a smart neighbourhood on an equal footing. What counts is the idea and the ‘get-up-and-go’ that it takes to turn the project into a success. Everyone has the same opportunity” (ibid., p. 74). In his speech in Tourcoing 10 years later, Emmanuel Macron doubled down on the ideology of meritocracy through entrepreneurship. He wanted to overturn “this society of status where success is for an economic aristocracy”. In the “Une chance pour chacun” speech, he notably argues for a “policy of emancipation” by entrepreneurship, in which “everyone is able to pursue their aspirations, and people are no longer confined to their place, whether social or territorial”.

Hervé Novelli et Emmanuel Macron véhiculent ainsi l’idée que la réussite entrepreneuriale repose sur le mérite des individus. Selon la sociologue Sarah Abdelnour, ils responsabilisent les classes populaires quant à leur situation socioprofessionnelle. Elle considère que la microentreprise « encourage les populations économiquement fragiles à se prendre en main » en créant leur propre emploi (2017, p. 32). Son analyse rejoint les réflexions critiques sur l’idéologie et les effets de la rationalité néolibérale (Boltanski et Chiapello, 2011 ; Brown, 2004). Cette dernière étend les valeurs du marché à toutes les sphères de la société et incite les individus à développer leur esprit d’entreprise pour ne pas en être exclus. C’est à chacun que revient le devoir de réussir en faisant preuve d’initiatives personnelles pour rester compétitif et employable. Si l’entreprise de soi augmente la capacité d’action, elle culpabilise également l’individu qui se juge seul responsable en cas d’échec. En valorisant la volonté individuelle comme critère neutre de succès, les acteurs politiques masquent l’influence des inégalités structurelles sur les conditions de vie. Ils dépolitisent ainsi les effets de leur stratégie entrepreneuriale.

Here, Hervé Novelli and Emmanuel Macron promote the idea that business success depends on individual merit. According to the sociologist Sarah Abdelnour, in so doing they attribute responsibility to the working classes for their socioprofessional situation. She considers that small businesses “encourage economically vulnerable populations to stand on their own feet” by creating their own jobs (2017, p. 32). Her analysis is in line with critical views on the ideology and effects of neoliberal rationality (Boltanski and Chiapello, 2011; Brown, 2004). This ideology extends market values to all spheres of society and encourages individuals to develop the spirit of enterprise in order to avoid being left out. It is each person’s responsibility to succeed by demonstrating personal initiative in order to remain competitive and employable. If self-enterprise increases the capacity for action, it also makes the individual feel solely responsible in the event of failure. By promoting individual drive as a neutral criterion of success, politicians mask the influence of structural inequalities on living conditions. In so doing, they depoliticise the effects of their entrepreneurial strategy.

 

 

Faciliter l’accompagnement à la création d’entreprise en QP pour plus de justice

Facilitating support for business creation in QPs for greater justice

Si la réussite incombe à l’individu, l’accès spatial aux structures d’accompagnement incombe à la puissance publique. Dès l’après-guerre, l’action publique territoriale française associe l’égalité sociale à l’égalité spatiale (Estèbe, 2015). Selon cette perspective théorique, l’égalité des chances advient par l’égal accès aux ressources. Leur distribution dans les QP entend « garanti[r] aux habitants des quartiers défavorisés l’égalité réelle d’accès » (ministère de l’Égalité des territoires et du logement, 2014, article 1). Les acteurs du soutien à l’entrepreneuriat insistent sur le mérite, mais s’inscrivent dans la conception traditionnelle de la lutte contre les inégalités en déployant spatialement les ressources à l’entrepreneuriat. L’accompagnement à la création d’entreprise est considéré comme un service auquel doivent avoir accès les résidents des QP pour améliorer leur existence, alors que les établissements économiques[4] évitent généralement ces territoires (CGET et CDC, 2016).

While success is down to the individual, spatial access to support structures is the task of government. Since the postwar era, French territorial public action has associated social equality with spatial equality (Estèbe, 2015). According to this theoretical position, equality of opportunity comes through equal access to resources. Distribution of those resources in the QPs is intended to “guarantee residents of deprived areas real equality of access” (Ministère de l’Égalité des territoires et du logement, 2014, article 1). The actors involved in supporting entrepreneurship emphasise merit, but also espouse the traditional conception of fighting inequality through the spatial distribution of the resources for entrepreneurship. Support for business creation is considered to be a service to which QP residents need to have access in order to improve their lives, given that business establishments generally avoid these areas (CGET and CDC, 2016).[4]

En effet, les QP condensent des discriminations multiples de genre, de classe sociale, de nationalité et de race[5]. En 2011, l’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances y a instauré des plans territoriaux de prévention des discriminations. Ces dernières limitent véritablement les capacités d’action des habitants. Des travaux de sociologie montrent par exemple que des discriminations sociales, raciales ou genrées restreignent l’accès des personnes qui les subissent aux systèmes d’enseignement et au marché de l’emploi (Beauchemin, Hamel et Simon, 2015). Or, une grande partie des résidents des QP appartiennent aux classes populaires ou sont d’origine étrangère, ou les deux[6], ce qui renforce leur précarité socioprofessionnelle, révélée par des taux d’inactivité et de chômage élevés. En 2019, la population active en QP atteint 58,5 %, avec 22,5 % de chômeurs parmi les actifs de 15 à 64 ans, contre 72,7 % et 8,4 % dans les unités urbaines de référence (observatoire national de la politique de la ville, 2021). La précarité réduit leurs ressources économiques et sociales et donc leur capacité à créer une entreprise. Les structures d’accompagnement étudiées accueillent beaucoup d’individus socialement discriminés par leur genre féminin, leur origine étrangère, ou leur manque de diplôme, ou plusieurs de ces éléments à la fois (figure 2). Ils portent des projets modestes, souvent immatriculés en tant que micro-entreprise.

QPs are areas characterised by an accumulation of multiple discriminations of gender, social class, nationality, and race.[5] In 2011, the Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances (National Agency for Social Cohesion and Equality of Opportunity) established territorial plans for the prevention of discrimination in these areas. Discrimination undoubtedly limits residents’ capacity for action. Sociological studies have shown, for example, that people who suffer social, racial, or gender discriminations experience restricted access to education systems and the job market (Beauchemin, Hamel and Simon, 2015). Moreover, a large proportion of QP residents are working-class or of foreign origin, or both,[6] which increases their socioprofessional vulnerability as revealed by high rates of economic inactivity and unemployment. In 2019, the share of working-age population in QPs was 58.5%, with 22.5% of this population aged 15 to 64 being unemployed, compared with respectively 72.7% and 8.4% in the benchmark urban units (Observatoire national de la politique de la ville, 2021). Precarity reduces their economic and social resources and therefore their capacity to create a business. The support structures studied here work with many individuals who experience social discrimination because they are female, of foreign origin, or lack qualifications, or a combination of these factors (figure 2). Their business projects tend to be modest, often registered as micro-enterprises.

Tableau des profils des personnes accueillies par les structures d’accompagnement étudiées

Figure 2 : Profils des personnes accueillies par les structures d’accompagnement étudiées © Loréna Clément

Figure 2: Profiles of clients of the support structures investigated © Loréna Clément

 

 

L’implantation en QP d’une politique nationale ancienne

Introduction of a long-standing national policy into QPs

En 2013, le président François Hollande lance le plan Entrepreneurs des quartiers qui marque un tournant dans la territorialisation du soutien à la création d’activité en QP. Il entend lutter contre l’inégalité urbaine des chances à entreprendre en augmentant de 50 % l’activité des structures d’accompagnement en QP. Jusqu’à la loi du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine, l’axe économique n’est pas une priorité dans la politique de la ville. Née à la fin des années 1970, celle-ci cible d’abord la cohésion sociale et le renouvellement urbain. L’intérêt pour le développement économique apparaît surtout à partir des années 1990. L’État établit les zones franches urbaines pour inciter les entreprises à s’implanter et à embaucher en QP en échange d’avantages fiscaux. La mise en place de l’Établissement public national d’aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux (Epareca) participe aussi à dynamiser l’économie des QP ; c’est également le cas des mesures favorisant l’emploi des habitants. En 2014, le développement économique et l’emploi deviennent un axe d’intervention à part entière de la politique de la ville. Différentes actions sont menées pour encourager la création d’entreprises, dont la spatialisation de l’accompagnement à la création et au développement d’activité en QP. La Banque publique d’investissement (BPI) gère le programme national Entrepreneuriat pour tous[7] qui leur est destiné.

In 2013, President François Hollande launched the Entrepreneurs des quartiers plan, which marked a turning point in the territorialisation of support for business creation in QPs. His aim was to combat urban inequality of opportunity for business creation by increasing the activity of support structures in QPs by 50%. Until the planning law for the city and urban cohesion of 21 February 2014, economic issues were not a priority in urban policy. At the time of the emergence of urban policy in the late 1970s, the initial priorities were social cohesion and urban renewal. Interest in economic development primarily dates back to the 1990s. The government established urban free zones to encourage companies to move into and hire personnel in QPs in exchange for tax breaks. The creation of the Établissement public national d’aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux (Epareca; national public establishment for the development and restructuring of commercial and small business areas) also helped to stimulate the economy of the QPs, as did measures to boost employment among residents. In 2014, economic development and employment became an integral component of urban policy action. Various measures were introduced to encourage business creation, including the spatialisation of support for the creation and development of economic activity in the QPs. The Banque publique d’investissement (BPI; Public Investment Bank) manages the national Entrepreneurship for All programme targeting these areas.[7]

La politique de soutien à l’entrepreneuriat en QP s’inscrit dans un contexte national. Depuis la restructuration industrielle postfordiste des années 1970, les pouvoirs publics multiplient les mesures qui favorisent les créations d’entreprises, sources de croissance économique. Dans une conjoncture marquée par la précarité salariale et le chômage, le soutien à l’entrepreneuriat devient une politique nationale en faveur de l’emploi (Aucouturier, 1996). Dans les années 2010, l’instauration de la microentreprise renforce la relation entre la création d’activité et l’auto-emploi. Pour Sarah Abdelnour, elle équivaut même à une politique sociale qui cible d’abord les exclus du marché du travail.

The entrepreneurship support policy in QPs has its roots in national policy. Since the post-Fordist industrial reorganisation of the 1970s, governments have introduced more and more measures to promote business creation in order to stimulate economic growth. In a climate marked by wage insecurity and unemployment, support for entrepreneurship became a national policy for jobs (Aucouturier, 1996). In the 2010s, the establishment of micro-enterprises reinforced the link between business creation and self-employment. In the view of Sarah Abdelnour, it can even be equated with a social policy targeted primarily at people who are excluded from the job market.

En incitant les structures d’accompagnement à la création d’entreprise à agir dans les QP, l’État vise l’égalité des chances des habitants. Malgré un rôle accordé au mérite personnel, cette politique territoriale révèle une vision distributive de la justice. Il s’agit maintenant d’examiner comment elle se traduit concrètement sur le terrain en observant si des espaces ou des publics, ou les deux, profitent davantage que d’autres des ressources proposées par les structures d’accompagnement.

By encouraging business creation support structures to operate in the QPs, the state is seeking to enhance equality of opportunity for the people living there. Despite the role it attributes to personal merit, this territorial policy reflects a distributional vision of justice. The task here is to examine how it is reflected on the ground, by observing whether areas or populations, or both, benefit more than others from the resources provided by the support structures.

 

 

Des inégalités spatiales et sociales d’accès à l’entrepreneuriat

Spatial and social inequalities in access to entrepreneurship

Des disparités spatiales entre les QP d’une intercommunalité

Spatial disparities between the QPs in an intermunicipal area in Nantes

Les structures d’accompagnement ne sont pas accessibles à tous, car elles sont inégalement réparties entre les QP d’une intercommunalité. L’enquête révèle, en effet, un déséquilibre dans leur localisation, créant des inégalités d’accès entre des habitants qui sont souvent contraints dans leur mobilité. La carte de la répartition des actions du dispositif nantais illustre ce constat (figure 3). Construite à partir d’observations, d’entretiens et d’analyses de documents, elle montre la géographie de l’action du dispositif en situant ses principaux partenaires. Les lieux d’accueil et d’hébergement entrepreneurial sont surtout placés à l’ouest du centre-ville de Nantes. Le bilan d’activité de 2019 du dispositif souligne, de plus, un accompagnement inégal selon les QP. Les quartiers Bellevue ou Dervallières regroupent la majorité des projets accompagnés au détriment du Sillon ou de Rezé. Cette disproportion s’explique par des différences démographiques, d’accessibilité, de dynamisme économique et de présence d’acteurs institutionnels préexistant entre les QP. Par exemple, Bellevue, qui regroupe un tiers des habitants vivant en QP, est accessible en transports en commun, compte un nombre important d’entreprises, et fait l’objet de projets de renouvellement urbain et de restructuration commerciale pilotés par Nantes Métropole. Cette dernière entend y renforcer l’activité économique, quand le nombre d’entrepreneurs y est déjà plus conséquent qu’ailleurs. Pragmatiques, les conseillers du dispositif Osez entreprendre agissent dans les QP où existent des salles et des partenaires pouvant accueillir leurs actions. Ils tiennent par exemple une permanence hebdomadaire à Bellevue, dans un local prêté dans le cadre du renouvellement urbain. Finalement, la localisation de l’accompagnement à l’entrepreneuriat renforce la spécialisation socio-économique des QP nantais. Ces inégalités urbaines d’accès sont visibles dans d’autres secteurs d’action publique tels que les lieux de dépistage du cancer du sein implantés en QP (Vaillant et al., 2020). L’inégale répartition des ressources entre les QP pour créer et développer une entreprise est toutefois partiellement rééquilibrée par un maillage intercommunal des maisons d’emploi et de quartier qui accueillent des événements et favorisent une proximité dans tous les quartiers.

The support structures are not available to all, because they are unequally distributed between the QPs in a joint intermunicipal area. Indeed, the survey reveals an imbalance in their location, which creates inequalities of access between people in areas where mobility is often restricted. The map of the distribution of support activities in Nantes illustrates this reality (figure 3). Constructed from observations, interviews, and document analyses, it shows the geography of the activities of the support structure by situating its main partners. The business support and incubator premises are primarily located west of Nantes city centre. Moreover, the structure’s 2019 activity report reveals unequal across different QPs. The Bellevue or the Dervallières municipalities contain the majority of the projects supported, to the detriment of Sillon or Rezé. This disproportion is explained by disparities between the QPs in terms of demographics, accessibility, economic dynamism, and the presence of pre-existing institutional actors. For example, Bellevue, where a third of QP residents live, is accessible by public transport, is home to a significant number of businesses, and is the site of urban renewal and commercial regeneration projects headed by Nantes Métropole. The latter is seeking to reinforce economic activity there, although the area is already home to more entrepreneurs than elsewhere. Pragmatically, the advisers in the Osez entreprendre structure operate in the QPs where there are premises and partners who can host their activities. For example, they hold a weekly workshop in Bellevue in premises lent to them as part of the urban renewal process. Finally, the location of the entrepreneurship support network reinforces the socioeconomic specialisation of the QPs in Nantes. These urban inequalities of access are visible in other spheres of public action such as the breast cancer screening centres located in QPs (Vaillant et al., 2020). However, the unequal distribution of resources between QPs for the creation and development of businesses is partially counterbalanced by an intermunicipal network of employment and neighbourhood centres that host events and provide local service in all neighbourhoods.

Carte de la répartition spatiale inégale des actions du dispositif nantais Osez entreprendre

Figure 3 : La répartition spatiale inégale des actions du dispositif nantais Osez entreprendre. Source : carte réalisée par Loréna Clément à partir du site internet Système d’information géographique de la politique de la ville

Figure 3: The unequal spatial distribution of Osez entreprendre agency sites in Nantes. Source: map produced by Loréna Clément from the website Système d’information géographique de la politique de la ville

Située en Seine-Saint-Denis, la Miel œuvre aussi de manière inégale sur le territoire intercommunal. La figure 4 révèle la localisation prédominante de ses événements dans le centre-ville dionysien et à proximité de Paris. Les QP d’Épinay-sur-Seine, Villetaneuse ou Stains sont moins concernés. Si le président de la Miel justifie ces implantations en valorisant leur accessibilité intercommunale, les rapports d’activité montrent une variation d’entrepreneurs accompagnés selon leur ville de résidence. En 2019, la Miel accueille peu d’entrepreneurs de La Courneuve, Villetaneuse ou Pierrefitte-sur-Seine par rapport à leur poids démographique dans l’intercommunalité. Par exemple, La Courneuve représente 10 % de la population de Plaine Commune, mais 5 % des entrepreneurs accueillis. Leur proportion décline dans l’ensemble depuis 2016 alors que le nombre d’entrepreneurs accueillis venant de Saint-Denis, Stains ou Aubervilliers augmente. Les ressources de la Miel profitent donc aux habitants des communes les plus proches ou les mieux desservies dans un contexte où les conseillers se déplacent peu dans les QP de l’agglomération. Les communes géographiquement avantagées correspondent par ailleurs à des territoires économiquement dynamiques où le soutien à l’entrepreneuriat est porté politiquement. À Saint-Denis où un élu est le président de la Miel, la municipalité met à disposition d’entrepreneurs des lieux qu’elle gère.

Located in Seine-Saint-Denis, the Miel’s operations are also distributed unequally across the intermunicipal area. The figure 4 shows how its events predominantly take place in the town centre and close to Paris. It is less active in the QPs in Épinay-sur-Seine, Villetaneuse or Stains. While the head of the Miel justifies the location of these sites by emphasising their accessibility from different parts of the intermunicipal zone, the activity reports show differences in support for entrepreneurs depending on their place of residence. In 2019, the Miel supported few entrepreneurs from La Courneuve, Villetaneuse or Pierrefitte-sur-Seine relative to their demographic weight in the intermunicipal area. For example, La Courneuve accounts for 10% of the population of Plaine Commune, but only 5% of the entrepreneurs supported. Their overall proportion has declined since 2016, whereas the number of entrepreneurs from Saint-Denis, Stains or Aubervilliers receiving support has increased. In other words, Miel’s resources benefit inhabitants of the closest or best served municipalities, especially given that the advisers do not travel much around the city’s different QPs. Moreover, the municipalities with the most geographical advantages correspond to economically dynamic areas where support for entrepreneurship has political backing. In Saint-Denis, where one of the elected officials is head of the Miel, the municipality makes its own managed premises available to entrepreneurs.

Carte de la répartition spatiale inégale des actions de la Miel

Figure 4 : La répartition spatiale inégale des actions de la Miel. Source : carte réalisée par Loréna Clément à partir du site internet Système d’information géographique de la politique de la ville

Figure 4: The unequal spatial distribution of the Miel’s operations. Source: map produced by Loréna Clément from the website Système d’information géographique de la politique de la ville

La répartition intercommunale irrégulière des lieux et des actions des structures d’accompagnement conduit à un accès inégal des individus aux ressources pour entreprendre en fonction de leur QP de résidence. Ce constat rejoint celui de l’agence publique d’urbanisme de l’agglomération bordelaise qui montre comment le maillage différencié des structures de soutien à l’entrepreneuriat entre les QP des rives droite et gauche de la Garonne engendre une inégalité d’accès à cet accompagnement pour les habitants (A’Urba, 2021). Conscients de ces enjeux, les conseillers du dispositif Osez entreprendre mènent des actions de sensibilisation en plein air dans les QP où ils n’ont pas de local. En 2019, ils s’installent, par exemple, tous les mois sur le marché de Rezé pour informer les passants. À deux reprises pendant l'année, ils se déplacent, pendant deux jours, avec un bus de sensibilisation qui s’arrête dans quatre QP différents.

The consequence of the uneven intermunicipal distribution of the support structures’ premises and activities is that the access that people have to entrepreneurship resources depends on the QP they live in. This observation accords with the view of the Bordeaux public urbanism agency, which has shown how the uneven coverage of the entrepreneurship support structures between QPs on the right and left banks of the Garonne results in inequality in access to this support among local people (A’Urba, 2021). Aware of these issues, advisers for the Osez entreprendre agency conduct open-air awareness-raising events in the QPs where they have no premises. In 2019, for example, they set up a stall every month on Rezé market to provide information to passers-by. On two occasions, they travelled for two days with an awareness-raising bus, stopping in four different QPs.

 

 

Des disparités sociales entre les structures implantées en QP

Social disparities between the structures located in QPs

À l’inégale proximité de l’accompagnement s’ajoute l’inégal accès aux structures selon le type du projet entrepreneurial mené. À Plaine Commune, l’intercommunalité applique une politique d’aide à l’entrepreneuriat pour deux objectifs : l’insertion socioprofessionnelle d’habitants et le développement économique du territoire. Cette double finalité la conduit à soutenir deux types de structure d’accompagnement : celles qui s’adressent aux individus menant une petite activité et aspirant à un renouveau professionnel, et celles pour les porteurs d’une activité à fort potentiel de développement. À la Miel, une grande partie des projets accompagnés sont des microentreprises relevant de secteurs traditionnels comme la revente, les services à la personne, la restauration, les voitures de transport avec chauffeur ou encore la construction, le bâtiment et les travaux publics, qui nécessitent peu d’investissements. Il en va autrement à la Pépinière, gérée par un conseiller de la Miel (figure 5). Cette structure d’hébergement a été créée par des élus intercommunaux pour favoriser le développement local. Elle se situe dans une cité de La Courneuve. Les entreprises qu’elle accueille développent surtout des projets numériques à potentiel de croissance : télémarketing, commerce en ligne d’objets connectés, conception de jeux vidéo, de logiciel de calcul ou lutherie électronique. Trois entreprises sont d’ailleurs labellisées « French Tech Diversité ».

In addition to geographical differences in access to support, access to the structures varies between different types of entrepreneurial projects. In Plaine Commune, the intermunicipal authority has two goals in providing political support for entrepreneurship: socioprofessional integration for local people and the economic development of the area. This twofold objective leads it to support two types of support structure: those targeted at individuals trading in a small way who would like to upgrade their skills, and those targeting businesses with significant development potential. At the Miel, a large proportion of the projects supported are micro-enterprises operating in traditional sectors such as reselling, human services, catering, taxicab services, or else construction and public works, which require little investment. Things are different at the Pépinière, which is run by a Miel adviser (figure 5). This business incubator was set up by officials in the intermunicipal authority to promote local development. It is located on a housing estate in La Courneuve. The businesses it supports are primarily digital projects with potential for growth: telemarketing, online trading, videogame design, computer software, or electronic music software. In fact, three companies have been awarded the “French Tech Diversité” label.

Tableau présentant le type d'accompagnement à la Miel et la Pépinière

Figure 5 : La Miel et la Pépinière, deux types d’accompagnement à l’entrepreneuriat © Loréna Clément

Figure 5: The Miel and the Pépinière, two types of support for entrepreneurship © Loréna Clément

Nécessitant davantage de ressources économiques, scolaires et sociales que celles présentes à la Miel, les entreprises soutenues par la Pépinière sont, de plus, portées par des profils sociaux différents. À la Miel, hommes et femmes, d’une moyenne d’âge de 40 ans, sont à parité, et 41 % possèdent un niveau d’études égal ou inférieur au baccalauréat. À la Pépinière, les 24 entrepreneurs hébergés sont à 80 % des hommes, de 25 à 35 ans, titulaires au moins d’une licence universitaire. Cherchant à optimiser leur potentiel de croissance, la Pépinière offre plus de possibilités que la Miel aux entrepreneurs qu’elle accompagne. Si les deux structures fournissent un suivi individuel et des formations collectives, la première dispose de bureaux et d’ateliers, d’espaces de coworking et de détente, d’un réfectoire. À l’inverse, la Miel ne propose pas d’espace partagé à ses entrepreneurs. Des chercheurs ont pourtant montré que la colocalisation organisée favorise la socialisation et augmente les opportunités économiques (Burret, 2013). Par ailleurs, l’accès à un espace de travail légitime la posture professionnelle des entrepreneurs en leur procurant une vitrine institutionnelle qui les crédibilise (Fabbri, 2015). Les porteurs de petits projets suivis par la Miel, souvent plus âgés, de sexe féminin et moins diplômés que les entrepreneurs hébergés par la Pépinière, ont ainsi moins d’opportunités de développement. Des enquêtés déplorent le manque de mise en relation entre eux et expriment leur difficulté à stocker leurs produits. Leur possibilité limitée d’hébergement entrepreneurial révèle un accès différencié aux ressources pour l’entrepreneuriat qui reproduit des inégalités de genre, d’âge et de diplôme à la création d’entreprise.

Requiring more financial, educational and social resources than those covered by the Miel, the businesses supported by the Pépinière are also different in their social characteristics. At the Miel, there are roughly equal numbers of men and women, with an average age of around 40, and 41% of them have a level of education at or below the baccalaureate. At the Pépinière, 80% of the 24 entrepreneurs supported are men, aged 25 to 35, with at least a university degree. Hoping to maximise their growth potential, the Pépinière offers more possibilities than the Miel to the entrepreneurs it supports. While both structures provide individual mentoring and group training, the former has offices and workshops, co-working and relaxation areas, and a refectory. In contrast, the Miel does not provide any co-working premises for its entrepreneurs. Yet researchers have shown that organised co-location fosters socialisation and enhances economic opportunities (Burret, 2013). Moreover, access to a workspace legitimises the professional standing of the entrepreneurs by giving them a credible institutional platform (Fabbri, 2015). As a result, the individuals engaged in small projects supported by the Miel, who tend to be older, female, and less qualified than the entrepreneurs supported by the Pépinière, have fewer opportunities for development. People we interviewed complained about the lack of networking opportunities and the difficulty in storing their products. The limited nature of their entrepreneurial support reveals disparities in access to resources for entrepreneurship that reproduce inequalities of gender, age, and qualifications in business creation.

Gestionnaire de la Pépinière, qui est située à moins de deux kilomètres de ses locaux, la Miel tente néanmoins d’ouvrir la structure à ses entrepreneurs moins qualifiés en y donnant des formations. Elle invite également les publics des deux structures à ses événements festifs. Ses efforts ne compensent toutefois pas la segmentation entrepreneuriale et sociale. Le gérant de la Pépinière reconnaît d’ailleurs que sa stratégie de développement local repose sur l’attraction de projets exogènes prometteurs plus que sur l’entrepreneuriat des habitants (entretien à la Pépinière, avril 2018). La moitié des personnes hébergées vivent à Paris. Une entrepreneuse de la Miel qui a vécu à côté de la Pépinière rapporte qu’ils « font tache par rapport au décor ». « En costume », « ils n’ont pas le même style » que la population locale. Ce décalage vestimentaire permet aux habitants de « savoir qu’il y a quelque chose » (entrepreneuse de la Miel, entretien à Saint-Denis, juin 2019). Ce constat rappelle des travaux sur l’ancrage géographique des espaces de travail partagé montrant qu’ils constituent des enclaves « hors-sol » déconnectées de l’animation urbaine locale (Ferchaud, 2018, p. 530).

As the operator of the Pépinière, which is located less than 2 km from its premises, the Miel is nonetheless trying to open its structure to its less qualified entrepreneurs by running training courses there. It also invites the users of both structures to its social events. However, these efforts are not sufficient to offset entrepreneurial and social segmentation. Indeed, the manager of the Pépinière acknowledges that his local development strategy relies more on attracting promising projects from outside the area than on local entrepreneurship (interview at the Pépinière, April 2018). Half the people supported live in Paris. One female entrepreneur at the Miel who lived next to the Pépinière reported that they “stick out like a sore thumb”. “Wearing suits,” “they don’t have the same style” as the local population. This difference in dress tells the locals that “there’s something going on” (entrepreneur at the Miel, interview in Saint-Denis, June 2019). This observation brings to mind studies on the geographical embeddedness of co-working spaces which show that they constitute “detached” enclaves disconnected from local urban conditions (Ferchaud, 2018, p. 530).

Le déploiement de l’accompagnement à la création d’activité en QP démontre l’inégalité des chances à entreprendre, du fait d’un accès spatial qui est socialement différencié aux structures et à leurs ressources. Il s’agit alors de penser autrement les moyens d’atteindre l’égalité dans le soutien à l’entrepreneuriat en QP.

The implementation of entrepreneurship support in QPs demonstrates inequality in the opportunities for enterprise because of socially differentiated spatial access to the structures and their resources. This suggests the need for looking at other ways to achieve equality in the support for entrepreneurship in deprived areas.

 

 

Reconnaître la pluralité entrepreneuriale dans un contexte d’inégalités structurelles

Recognising entrepreneurial plurality in a context of structural inequalities

Prendre en compte les structures sociales inégalitaires

Taking account of inegalitarian social structures

Les structures d’accompagnement cherchent à renforcer les compétences des entrepreneurs pour augmenter leur capacité d’action mais elles oublient l’impact des structures inégalitaires dans lesquelles ils se meuvent. Les conseillers leur apportent des informations sur la création d’activité, un carnet d’adresses et des codes de savoir-être pour qu’ils développent leur projet. Toutefois, les entrepreneurs ne sont pas tous capables de convertir ces apports en occasions, car ils possèdent de faibles ressources économiques, scolaires, sociales, ou les trois à la fois. Celles-ci sont fondées sur, et alimentent, des inégalités plurielles. La situation des mères entrepreneuses révèle par exemple le poids des inégalités de genre dans l’accès aux ressources. Parmi les seize mères ayant répondu à l’enquête, cinq ont spontanément évoqué une activité économique spatialement réduite, parce qu’elles doivent rester proches de l’école de leurs enfants ; quatre ont déclaré que le fait de les garder limite leur présence aux événements en soirée. Mentionnant sa zone de distribution, une productrice de beignets sénégalais précise : « Je préfère faire à Nantes nord, c’est mon secteur d’habitation, mes enfants sont à côté à l’école […] Quand on a des enfants, il faut que ce soit plus proche des enfants parce qu’après, ce sont des allers-retours en cas d’urgence » (entretien téléphonique, octobre 2018). À l’inverse, les hommes enquêtés n’évoquent jamais les effets de la parentalité sur le développement de leur projet. Si les structures d’accompagnement proposent des ressources à tout entrepreneur volontaire, ces dernières sont donc inégalement appropriées selon les positions sociales. Plusieurs entrepreneuses ont rapporté leur difficulté à intégrer le collectif d’entrepreneurs d’une des structures d’Osez entreprendre, composé d’individus en reconversion professionnelle, de nationalité française, et titulaires de diplôme de master. Souvent d’origine étrangère, femmes, moins diplômées, elles ne s’y sentent pas légitimes. Originaire du Maroc et arrivée en France à l’âge de 11 ans, une entrepreneuse de 47 ans qui vend des objets artisanaux marocains a quitté l’école à 16 ans sans qualification. Fatiguée par des emplois socialement dévalorisés et n’ayant plus à s’occuper de ses enfants devenus majeurs, elle décide de créer et développer une entreprise. Malgré sa détermination, elle participe peu aux formations collectives de la structure qui l’accompagne, car elle continue à travailler pour subvenir aux besoins familiaux. De plus, elle ne s’y sent « pas à l’aise » malgré une ambiance « comme [celle d’]une grande famille » :

The aim of the support structures is to reinforce the skills of entrepreneurs in order to augment their capacity for action, but they forget the impact of the inegalitarian structures in which they are embedded. The advisers give them information on business creation, an address book, and rules of practice to help them develop their projects. However, not all entrepreneurs are capable of converting these inputs into opportunities, because they possess poor economic, educational, or social resources, or all three. These resources are founded on, and contribute to, multiple inequalities. This situation of mompreneurs, for example, reveals the impact of gender inequalities in access to resources. Of the sixteen mothers who responded to the survey, five spontaneously mentioned the spatial constraints their business activity, because of their need to remain close to their children’s school. Four said that childcare prevented them from attending evening events. In reference to her distribution area, one producer of Senegalese pancakes explained: “I prefer working in northern Nantes, which is close to where I live, my children are at school nearby […] When you have children, you have to stay closer to their school as otherwise it’s a long round trip if there’s an emergency” (telephone interview, October 2018). Conversely, none of the men we interviewed mentioned the effects of parenthood on the development of their projects. So while the support structures provide resources to any entrepreneur who wants them, the capacity to use those resources varies according to the social positions of the users. Several female entrepreneurs reported their difficulty in joining the entrepreneurs group in one of the Osez entreprendre retraining structures, which consisted of individuals of French nationality all with a master’s degree. Often of foreign origin, female, less qualified, they did not feel legitimate in this group. Born in Morocco, but raised in France since the age of 11, one 47-year-old female entrepreneur, who sells Moroccan craft objects, left school at 16 without qualifications. Tired of doing low-status jobs and no longer needing to care for her grown-up children, she decided to set up and develop a business. Despite her determination, she rarely takes part in her support structure’s group training sessions, because she still has to work in order to meet family needs. Moreover, she doesn’t feel “comfortable” there, despite the “big family” atmosphere:

« C’est vrai qu’eux, ils étaient vachement en avance par rapport au numérique, par rapport à tout ça. Je ne me sentais pas à ma place. Mais ils m’ont dit : “Non, tu as autant ta place avec nous”. Je sentais qu’ils avaient un… Je ne sais pas. Ils avaient un parcours, un pas de plus que moi […] Alors que moi, je vais avec mes petits moyens. » (Entrepreneuse, entretien téléphonique, septembre 2018)

“It’s true that they were way more advanced with computers, with all that kind of thing. I felt out of place. But they said: ‘No, your place is definitely with us.’ I felt there was… I don’t know, just something. They had background, one step ahead of me […] While I haven’t got much to offer.” (Female entrepreneur, phone interview, September 2018)

La distance sociale est trop forte pour cette entrepreneuse étrangère aux faibles ressources scolaires et sociales. Elle saute néanmoins sur l’occasion quand sa conseillère lui propose d’occuper ponctuellement un espace de vente dans le centre-ville nantais. Mais cela tourne au désastre : les efforts de déplacement et le coût de location du lieu ne sont pas amortis. L’inexpérience de l’entrepreneuse en gestion et en communication limite ses ventes. Déstabilisée dans sa confiance en elle, elle arrête son projet.

The social gap is too wide for this woman, a foreigner with few educational and social resources. Nevertheless, she jumps at the opportunity when her adviser offers her a temporary sales outlet in the centre of Nantes. But it all goes wrong: sales don’t cover the cost of travel and the shop rent. Her lack of experience in business management and communication limits sales. With a big blow to her self-confidence, she gives up her project.

Finalement, les structures d’accompagnement apportent à tous des ressources pour entreprendre sans prendre en compte les facteurs sociaux qui empêchent leur conversion en occasions tels le genre féminin, l’appartenance aux classes populaires, l’origine géographique ou l’âge. Elles stabilisent, ainsi, sans le vouloir les positions sociales inégales des entrepreneurs.

Ultimately, the support structures give everyone the resources to start a business without taking into account the social factors that prevent them being converted into opportunities, for example being female, working-class, of foreign origin, or of a certain age. As a result, they unwittingly perpetuate inequalities in the social positions of their clients.

 

 

Reconnaître les diversités entrepreneuriales

Recognising entrepreneurial diversities

Les structures d’accompagnement s’inscrivent dans une conception universaliste de l’égalité. Il s’agit d’apporter à tous les ressources entrepreneuriales qui répondent aux attentes des acteurs économiques et permettent une égale intégration au marché. Des chercheurs critiques en science de gestion ont montré en quoi ces attentes sont construites sur une image mythifiée de l’entrepreneur incarné par un homme blanc, occidental et diplômé (Ahl, 2006 ; Ogbor, 2000). Ils considèrent que cette figure hégémonique maintient les rapports sociaux inégalitaires de genre, de classe et de race en instituant ses pratiques et ses représentations entrepreneuriales comme conformes tandis que la diversité entrepreneuriale est masquée, dévalorisée et délégitimée (Pailot, 2015). Les femmes, les personnes d’origine étrangère ou les classes populaires qui entreprennent feraient alors l’objet d’un impérialisme culturel (Young, 1990) en ce que leurs valeurs et leurs actions ne seraient pas assimilées à l’entrepreneuriat. Or, la majorité des enquêtés appartiennent à ces profils sociaux et s’écartent de la figure archétypale de l’entrepreneuriat. Pour les structures d’accompagnement, ils doivent s’acculturer aux conventions de la création d’activité. Par exemple, les conseillers organisent dans une ambiance conviviale des temps dédiés aux femmes entrepreneuses. Ces moments apportent réconfort et soutien. Ils permettent aux femmes d’échanger sur leurs difficultés à entreprendre au quotidien en prenant conscience que ces dernières sont genrées et partagées, comme l’articulation complexe de leurs tâches domestiques et entrepreneuriales. Toutefois, ces temps spécifiques légitiment les codes entrepreneuriaux masculins. Lors d’une soirée organisée par la Miel, les intervenantes ont encouragé les participantes à « réfléchir comme un homme » pour développer leur entreprise (observation à Saint-Denis, novembre 2018). Cette comparaison les incite à penser en gain financier et à agir sans temporiser en ayant confiance en leurs capacités. Les enquêtées se sentent majoritairement illégitimes en tant qu’entrepreneuses. Par conséquent, elles sous-estiment souvent le prix de leur produit par rapport à sa qualité. L’entrepreneuriat informel[8] connaît, lui aussi, un processus de normalisation. Les collectivités territoriales encouragent les structures à légaliser des activités existantes pour favoriser l’inclusion économique et sociale. Ces dernières sont surtout portées par des personnes éloignées de la culture administrative française du fait de leur nationalité étrangère ou de leur faible ressource scolaire, ou des deux. Par exemple, le conseil général de la Seine-Saint-Denis finance les structures qui aident à légaliser les projets d’entrepreneurs informels bénéficiaires du revenu de solidarité active. La ville de Saint-Denis a, quant à elle, lancé le projet Cuisines de rue pour formaliser la vente informelle pratiquées par des cuisinières de rue. La municipalité veut résoudre les conflits d’usage qu’elles créent dans l’espace public en les conformant aux normes socio-économiques qui structurent l’espace urbain. Elle entend également améliorer la situation précaire des cuisinières en augmentant leurs capacités d’action et leurs droits sociaux. Pour ce faire, elle a mandaté une association locale habituée à formaliser des projets menés par des publics précaires. L’association a conçu un triporteur mis à disposition des vendeuses. En échange du véhicule qui permet de stocker les repas et de circuler entre les quartiers, ces dernières cuisinent dans un local réglementaire et suivent un parcours entrepreneurial et social adapté. Elles apprennent le français, les règles juridiques, la réglementation en matière d’hygiène et la gestion commerciale.

The support structures are rooted in an universalist conception of equality. They aim to provide everyone with the entrepreneurial resources that meet the requirements of the economic institutions and allow equal integration into the market. Critical researchers in the field of management science have shown how these requirements are built on a mythified image of the entrepreneur as a white, western, educated male (Ahl, 2006; Ogbor, 2000). They take the view that this dominant archetype maintains inegalitarian social relations of gender, class, and race by constituting his entrepreneurial practices and representations as correct, whereas entrepreneurial diversity is masked, devalued, and delegitimised (Pailot, 2015). On this view, women, people of foreign or working-class origin who want to set up businesses are subject to a form of cultural imperialism (Young, 1990) in that their values and actions are not perceived as entrepreneurship. In our case, the majority of the people surveyed fitted this description and fell outside the archetypal figure of the entrepreneur. The assumption in the support structures is that they need to adapt to the conventions of business creation. For example, the advisers organise relaxed social events specifically for female entrepreneurs where they can enjoy mutual reassurance and support. They give the women an opportunity to talk about their day-to-day difficulties in running a business, and to realise that these difficulties are gendered and shared, for example, the complex problem of combining domestic and business duties. However, these dedicated events legitimise male entrepreneurial codes. At one women’s evening organised by the Miel, the female speakers encouraged the participants to “think like a man” in order to develop their businesses (observation at Saint-Denis, November 2018). They were encouraged to think about making money and to have the self-belief to act quickly. Most of the women we spoke felt like imposters in their role as entrepreneurs, and in consequence tended to underestimate the price of their products relative to their quality. Informal entrepreneurship is also undergoing a process of normalisation.[8] Local authorities encourage the support entities to legalise existing business activities in order to promote economic and social inclusion. These activities are primarily conducted by people who have little familiarity with France’s administrative culture, either because they are foreign, or lack education, or both. For example, the conseil général de la Seine-Saint-Denis (General Council) funds structures that help to legalise the business projects of informal traders who are recipients of the revenue de solidarité active (active solidarity revenue) benefits. For its part, Saint-Denis municipality has launched the Cuisines de rue (street kitchens) project to formalise the informal selling of street food. The municipality wants to resolve the conflicts of use that they generate in public space by bringing them into line with the socioeconomic norms that structure urban space. It also hopes to improve the vulnerable situation of the women who run the street kitchens, by enhancing their capacity for action and their social rights. To do this, it has appointed a local organisation with experience in formalising projects conducted by vulnerable populations. The organisation has designed a delivery tricycle which the street cooks can use to store their meals and transport them between neighbourhoods. In return, these women agreed to do their cooking in regulated premises and undertake appropriate business and social training. They learn French, the legal rules, hygiene regulations, and business management.

En les professionnalisant, le projet Cuisines de rue légitime des pratiques commerciales, culinaires et culturelles qui s’écartent de la figure entrepreneuriale dominante. Il maintient et visibilise un entrepreneuriat de rue populaire en lui donnant accès à l’espace public urbain. Ce résultat invite à réfléchir à la place de l’altérité dans l’accompagnement à la création d’entreprise en QP pour penser l’égalité. La philosophe Iris Marion Young (1990) prône la reconnaissance des différences comme objectif de justice. En s’inspirant de ses réflexions, il s’agirait moins d’intégrer les entrepreneurs au marché en les conformant aux normes dominantes qu’à reconnaître leur statut de partenaire égal dans la production économique, sociale et urbaine. Le Conseil national des villes revendique la reconnaissance de l’économie informelle comme une forme de développement local des QP et d’émancipation des habitants (2019). Plus qu’une pratique à transformer, il l’envisage comme une ressource à valoriser. Peu suivi d’effets, son avis a été partiellement repris 2021 par l’Agence nationale de la rénovation urbaine (ANRU) au sujet du développement économique dans les quartiers en renouvellement urbain. La posture ambiguë de l’ANRU traduit une reconnaissance incomplète de l’économie informelle : si elle valorise les compétences et la culture des résidents, l’agence préconise la légalisation progressive de leurs activités entrepreneuriales pour réduire les nuisances urbaines et améliorer l’image des QP. La reconnaissance de l’économie informelle ne constitue qu’une étape avant l’intégration au système économique et urbain formel. Si cette dernière apporte une protection juridique et sociale aux individus, elle n’est pas redéfinie à partir des usages pluriels de l’entrepreneuriat. Les entrepreneurs informels sont toujours considérés comme des bénéficiaires plus que comme des partenaires.

By professionalising them, the Cuisines de rue project legitimises commercial, culinary, and cultural practices that differ from the dominant entrepreneurial framework. They maintain and bring into the open a form of working-class street entrepreneurship by giving it access to urban public space. This outcome raises questions about the role of otherness in relation to equality in the support for business creation in QPs. The philosopher Iris Marion Young (1990) calls for the recognition of differences as one of the objectives of justice. On this perspective, the aim would be less to integrate entrepreneurs with the market by bringing them into line with dominant norms, than to recognise their status as equal partners in economic, social, and urban production. The National Council of Municipalities called for the informal economy to be recognised as a form of local development for priority areas (QPs) and of emancipation for the people living in them (2019). More than a practice that needs to change, they saw it as a resource to be exploited. Nothing much changed, but this view was partially taken up in 2021 by the Agence nationale de la rénovation urbaine (ANRU; national urban renovation agency) with respect to economic development in urban renewal areas. ANRU’s ambiguous stance reveals an incomplete recognition of the informal economy: while it acknowledges the competences and culture of the inhabitants of these areas, the agency recommends the gradual legalisation of their entrepreneurial activities in order to reduce the urban problems and enhance the image of the QPs. Recognising the informal economy is just one step on the way to its integration into the formal economic and urban system. While integration gives individuals legal and social protection, it is not redefined to take account of the multiple forms of entrepreneurship. Informal entrepreneurs are still considered more as beneficiaries than as partners.

En outre, les structures ne s’ajustent pas à tous les profils qu’elles accompagnent. Bien qu’elles ciblent les femmes, elles négligent l’influence de l’origine étrangère sur le projet entrepreneurial. Or, les personnes d’origine étrangère représentent une grande partie du public suivi. Plusieurs enquêtés ont déploré l’absence de formation sur les partenariats étrangers quand ils veulent développer leur activité en Afrique. La dimension transnationale n’entre pas dans le champ de compétences des conseillers, alors que les entrepreneurs mobilisent souvent leurs contacts personnels internationaux et leurs connaissances culturelles hybrides pour construire leur projet (Portes, 1999). Seize des vingt-sept enquêtés d’origine étrangère mènent une activité à l’international ou envisagent de le faire. Treize d’entre eux vendent des produits dits « ethniques » comme des cosmétiques pour peau mate, des vêtements en wax, des plats subsahariens ou des objets artisanaux. Une organisatrice de « mariages multi-ethniques » de 29 ans, d’origine angolaise, détentrice d’un BTS en communication, a imaginé son projet à partir de l’expérience de son couple mixte qui ne « voyait pas les choses de la même façon » sur le mariage (entretien à Châtillon, octobre 2018). Un entrepreneur de 35 ans, arrivé du Bénin en France à l’âge de 16 ans, détenteur d’un master en négociations d’affaires, crée quant à lui des produits corporels et capillaires destinés aux « personnes afro-descendantes » pour prendre soin de leurs cheveux (entretien à Saint-Denis, février 2019). Plusieurs travaux sociologiques pointent que l’approche spatiale de la lutte pour l’égalité permet de ne pas nommer les différences et les inégalités ethnoraciales (Doytcheva, 2016 ; Kirszbaum, 2016). La politique de la ville agit sur la dimension territoriale des inégalités sociales sans avoir à les spécifier. La réforme de 2014 combat pêle-mêle « les inégalités de tous ordres, les concentrations de pauvreté et les fractures économiques, sociales, numériques et territoriales », « les discriminations dont sont victimes les habitants des quartiers défavorisés » selon leur « lieu de résidence et […] l’origine réelle ou supposée » et agit pour « l’égalité entre les femmes et les hommes » (ministère de l’Égalité des territoires et du logement, 2014, articles 1 et 10). Dans ce contexte législatif confus visant à (r)établir l’égalité, l’action par la distribution spatiale domine encore la reconnaissance des pluralités socio-entrepreneuriales.

In addition, the structures do not adjust to all the profiles they support. Although they focus on women, they neglect the influence of foreign origin on entrepreneurial projects. Yet people of foreign origin represent a large proportion of the population concerned. Several of the people surveyed regretted the lack of training on foreign partnerships when they want to develop their business in Africa. The transnational dimension lies outside the skill set of the advisers, whereas the entrepreneurs often draw on their personal contacts abroad and their hybrid cultural knowledge in setting up their projects (Portes, 1999). Sixteen of the twenty-seven entrepreneurs of foreign origin were working internationally or thinking of doing so. Thirteen of them sell so-called ethnic products such as cosmetics for dark skin, wax clothing, sub-Saharan food, or craft objects. A 29-year-old organiser of “multi-ethnic marriages”, of Angolan origin, holder of a qualification in communication, devised her business idea from the experience of her own mixed couple which “had different ideas” about marriage (interview in Châtillon, October 2018). A 35-year-old entrepreneur with a master’s degree in business negotiation, who had come to France from Benin at the age of 16, produces haircare products for people of African descent (interview in Saint-Denis, February 2019). Several sociological studies have observed that the spatial approach to the struggle for equality can result in a failure to identify ethnoracial differences and inequalities (Doytcheva, 2016; Kirszbaum, 2016). Urban policy acts on the territorial dimension of social inequalities without having to specify them. The reform of 2014 opposes a mishmash of “inequalities of all kinds, concentrations of poverty and economic, social, digital, and territorial divides”, “discriminations experienced by the inhabitants of deprived neighbourhoods” on the basis of their “place of residence and […] real or supposed origin” and promotes “equality between women and men” (Ministère de l’Égalité des territoires et du logement, 2014, articles 1 and 10). In the context of this muddled legislative attempt to (re)establish equality, action based on spatial distribution continues to dominate the recognition of socio-entrepreneurial multiplicities.

 

 

Conclusion

Conclusion

L’article montre la pluralité des formes que prend l’accompagnement à l’entrepreneuriat en QP, selon les contextes territoriaux, les objectifs et les publics ciblés. Il expose aussi les limites de cette politique publique territoriale à visée égalitaire. La justice promue par l’implantation de ressources entrepreneuriales en QP est mise à mal par des inégalités spatiales et sociales d’accès à ces ressources. La présence d’un accompagnement à la création d’activité en QP ne rééquilibre pas les rapports sociaux inégalitaires qui influencent la capacité des individus à s’approprier les ressources proposées par les conseillers. Par ailleurs, l’écart entre l’image archétypale de l’entrepreneur et les profils des enquêtés engendre souvent une violence symbolique. L’absence de considération de leurs spécificités entrepreneuriales dans l’accompagnement, comme l’inscription transnationale de leur activité, renforce parfois cette violence. Pour atteindre plus de justice, il s’agirait d’adopter une dimension procédurale fondée sur la reconnaissance et la participation de tous les acteurs à la prise de décision. En légitimant les diversités entrepreneuriales, les enquêtés seraient considérés comme partenaires de la production économique et urbaine plutôt que comme individus à insérer. Mais les QP et leurs habitants sont définis par leur écart à la norme, écart qu’il s’agit de réduire (Epstein et Kirzsbaum, 2019). La logique réparatrice continue de prévaloir.

The article shows the multiplicity of forms that the support for entrepreneurship in QPs can adopt, according to territorial conditions, objectives, and the populations targeted. It also exposes the limitations of this would-be egalitarian territorial public policy. The justice sought through the siting of entrepreneurial resources in QPs is undermined by spatial and social inequalities in access to these resources. The presence of support for business creation in QPs does not counterbalance the inegalitarian social relations that influence the capacity of individuals to make use of the resources offered by the advisers. Moreover, the mismatch between the archetypal image of the entrepreneur and the profiles of the survey subjects often leads to symbolic violence. The absence of consideration for their entrepreneurial specificities in the support provided, as well as the transnational nature of their activity, sometimes reinforces this violence. In order to achieve greater justice, there is a need to adopt a procedural dimension founded on the recognition and participation of all the actors in the decision-making process. With the legitimisation of entrepreneurial diversity, these actors would be considered as partners in economic and urban production rather than individuals to be integrated. However, QPs and their inhabitants are defined by their divergence from the norm, and the objective of policy is to reduce this divergence (Epstein and Kirzsbaum, 2019). Reparatory thinking continues to dominate.

Des chercheuses en géographie économique proposent cependant le concept de diverse economies pour donner à voir les pratiques ordinaires d’habitants et penser de nouveaux mondes économiques à partir d’elles (Gibson-Graham, 2006). En suivant leurs réflexions, de nouveaux travaux pourraient étudier en quoi les expériences quotidiennes des entrepreneurs des QP participent à la fabrique urbaine. L’enquête révèle qu’ils mobilisent leurs cercles de connaissances proches pour mener leur projet. Ainsi, ils organisent et animent le territoire local. Ces pistes de recherche compléteraient notamment les résultats du collectif Rosa Bonheur (2019) qui analyse le travail et la production de l’espace populaire roubaisien.

However, in economic geography researchers put forward the concept of diverse economies in order to cast light on the ordinary practices of local people and to conceive of a new economic order based on these practices (Gibson-Graham, 2006). Following their ideas, further research could examine how the day-to-day experiences of entrepreneurs in QPs contribute to the making of the city. Our study reveals that they draw on their close acquaintanceship groups in order to undertake their projects, and in so doing organise and stimulate the local territory. Research along these lines would notably complement the findings of the Rosa Bonheur collective (2019), which analyses the work and production of public space in Roubaix.

 

 

Pour citer cet article

To quote this article

Clément Loréna, 2023, « L’accompagnement à l’entrepreneuriat dans les “quartiers prioritaires”, une politique publique de justice spatiale ? » [“Support for entrepreneurship in ‘priority neighbourhoods’, a public policy for spatial justice?”], Justice spatiale | Spatial Justice, 18 (http://www.jssj.org/article/laccompagnement-a-lentrepreneuriat-dans-les-quartiers-prioritaires-une-politique-publique-de-justice-spatiale/).

Clément Loréna, 2023, « L’accompagnement à l’entrepreneuriat dans les “quartiers prioritaires”, une politique publique de justice spatiale ? » [“Support for entrepreneurship in ‘priority neighbourhoods’, a public policy for spatial justice?”], Justice spatiale | Spatial Justice, 18 (http://www.jssj.org/article/laccompagnement-a-lentrepreneuriat-dans-les-quartiers-prioritaires-une-politique-publique-de-justice-spatiale/).

[1] La politique de la ville renvoie au concept de « maximin » de John Rawls (2009). Selon une logique réparatrice, les espaces les plus pauvres reçoivent davantage pour résorber les disparités et assurer à chacun, où qu’il réside, une qualité de vie satisfaisante.

[1] The politique de la ville (urban policy) relates to the concept of “maximin” developed by John Rawls (2009). Following reparative principles, the poorest areas receive more in order to iron out disparities and give everyone, wherever they live, a satisfactory quality of life.

[2] Les acteurs institutionnels recouvrent des profils divers tels que les acteurs politiques qui orientent les stratégies d’accompagnement, les acteurs administratifs qui les diffusent, les acteurs associatifs et les entreprises qui les appliquent.

[2] Institutional actors encompass a range of profiles, such as the politicians who direct the support strategies, the administrators who implement them, and the civil society organisations and businesses that apply them.

[3] Ils ont été enregistrés et retranscrits manuellement avec l’accord des répondants.

[3] They are recorded and manually transcribed with the agreement of the respondents.

[4] Il s'agit des lieux dédiés aux activités d'une entreprise.

[4] That is, places dedicated to business activities.

[5] J’utilise ce terme en tant que catégorie sociale et clé d’analyse des inégalités, et non en lien avec de quelconques données biologiques.

[5] I use the term “race” as a social category and a key to the analysis of inequalities, not as reflecting any biological data.

[6] Selon les données Insee pour 2019, en France, le taux d’étrangers concerne 21,2 % de la population en QP contre 7,1 % dans les autres quartiers.

[6] According to the Insee data for 2019, in France, foreigners account for 21.2% of QP populations, as compared with 7.1% in other areas.

[7] La BPI est l’organisme de financement et de développement des entreprises en France. Depuis 2019, elle porte la politique de soutien à l’entrepreneuriat en QP, précédemment dévolue à l’Agence France entrepreneur.

[7] The BPI is the entity responsible for the financing and development of companies in France. Since 2019, it has run entrepreneurship support policy in QPs, which was previously the task of the France Entrepreneur Agency.

[8] L’économie informelle regroupe « l’ensemble des initiatives et des activités […] créatrices de valeur et de lien de solidarité, qui échappent à la régulation de l’État et à la comptabilité nationale, qui ne s’inscrivent dans aucun cadre réglementaire et n’offrent, de ce fait, pas de protection sociale pour les personnes » (Conseil national des villes, 2019, p. 5).

[8] The informal economy encompasses “all initiatives and activities […] that create value and community bonds, which are external to state regulation and national accounting, form part of no regulatory framework and, for this reason, offer no social protection for the individuals concerned” (Conseil national des villes, 2019, p. 5).

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